Derrière des levées de fonds record, une génération montante

2,2 milliards d'euros. En neuf mois, les start-up françaises ont levé deux fois plus d'argent que l'année dernière, selon l'étude French Tech réalisée par SNCF Développement et C-Radar. Un succès qui traduit une arrivée massive de capitaux mais aussi d'une abondance de projets, et qui pourrait bien placer l'écosystème hexagonal à la tête du classement européen d'ici à la fin de l'année. Parmi les opérations les plus marquantes, celles d'Actility (95 millions d'euros), ManoMano (60 millions), Frichti (30 millions) ou Gensight Biologics.

Des montants qui paraissaient inimaginables il y a encore deux ans mais qui sont liés à l'autre phénomène à retenir de ce baromètre : le volume des fonds levés par les fonds de capital-risque atteint les 2,8 milliards. Un montant record qui pourrait présager d'un emballement sur les jeunes pousses tricolores, comme l'explique Samantha Jérusalmy, partner chez Elaia Partners : « Il n'y a jamais eu autant d'argent à investir en France, ce qui accentue la pression que nous avons vis-à-vis de nos propres investisseurs. » Une pression dont se servent les startuppeurs pour accélérer le développement de leurs projets, comme le rappelle Ludovic Le Moan, fondateur de Sigfox (300 millions d'euros levés au total) : « Si nous partons d'une simple feuille de route pour convaincre les premiers investisseurs, ces capitaux s'avèrent cruciaux pour gagner la bataille du temps qui est engagée avec nos compétiteurs. »

Des bulles autocorrigées

D'après l'étude, ces jeunes pousses ne réalisent en moyenne que 91.000 euros de chiffre d'affaires annuel, et ne comptent que 7 employés. « Ces données sont peu connues car ces entreprises ne déposent pas leurs comptes. Beaucoup d'entre elles, notamment dans le secteur des biotechs, n'ont pas démarré leur activité commerciale, ce qui explique ce chiffre d'affaires très bas. » Cela pourrait aussi logiquement laisser craindre un taux d'échec important, voire la création d'une bulle. « Comparé à la bulle de l'an 2000, le nombre de start-up par rapport à l'argent disponible est plus important aujourd'hui, rappelle Philippe Collombel, directeur général de Partech Ventures. Il existe bien des bulles ponctuelles, mais qui se corrigent d'elles-mêmes et très rapidement, notamment car les investisseurs sont mieux informés. » Aux Etats-Unis, ce phénomène s'est traduit par une survalorisation des entreprises qui s'apprêtaient à entrer en Bourse, comme Twitter ou Snapchat. Autre fait marquant, la précocité de certains futurs champions de la French Tech. Quatre start-up se distinguent dans ce baromètre SNCF Développement/C-Radar : Eren Renewable Energy, Blade, Nouvelle Vague et Vivet Therapeutics. Des pépites que Cyril Garnier, directeur général de SNCF Développement définit comme les futurs champions : « Elles sont les surdouées de leur génération. Des équipes de haut vol qui savent s'attirer la confiance des investisseurs. Ils réunissent des moyens à la hauteur de leur vision, ils sont la relève de 2018 ! » Et ils incarnent une nouvelle ère, décrypte Philippe Collombel : « Nous sommes face à une génération d'entrepreneurs très ambitieux. Ce sont des tueurs car ils sont très bien formés et n'ont peur de rien. Ca ne les intéresse pas de vendre leur entreprise pour amasser 10 millions. Ils veulent monter une entreprise dont on se souviendra ! »