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Carte blanche Les neuro-révolutionnaires

Carte blanche

Publié le 02 mai 2014 à 13h25, modifié le 19 août 2019 à 14h55 Temps de Lecture 2 min.

En mars, Ray Kurzweil, directeur du développement et ingénieur en chef de Google, a déclaré que nous utiliserions des nanorobots intracérébraux branchés sur nos neurones pour nous connecter à Internet vers 2035. Google, qui est déjà le leader mondial des neurotechnologies, entend franchir une nouvelle étape dans la maîtrise des cerveaux. D’abord, Google nous a orientés dans le Web et le monde réel grâce à son moteur de recherche, à Google Maps, aux Google cars et à Nest. Ensuite, il a commencé à stocker une partie de notre mémoire (Gmail, Picasa). Désormais, il augmente nos capacités sensorielles (Google Glass, Google lens…).

La quatrième étape commencera avec l’émergence d’une authentique intelligence artificielle dotée d’une conscience qui devrait écraser l’intelligence humaine dès 2045, selon Kurzweil. A cette date, l’intelligence artificielle sera, selon le dirigeant de Google, un milliard de fois plus puissante que la réunion de tous les cerveaux humains. La dernière phase aujourd’hui révélée par les dirigeants de Google sera l’interfaçage de l’intelligence artificielle avec nos cerveaux.

En quelques décennies, Google aura transformé l’humanité : d’un moteur de recherche, il sera devenu une neuroprothèse. « Dans environ quinze ans, Google fournira des réponses à vos questions avant même que vous ne les posiez. Google vous connaîtra mieux que votre compagne ou compagnon, mieux que vous-même probablement », a fièrement déclaré Ray Kurzweil, lequel est également persuadé que l’on pourra transférer notre mémoire et notre conscience dans des microprocesseurs dès 2045, ce qui permettrait à notre esprit de survivre à notre mort biologique. L’informatique et la neurologie ne feront qu’un !

Ces neurotechnologies sont littéralement révolutionnaires en ce qu’elles bousculent l’ordre social. Pouvons-nous y échapper ? Une contre-neuro-révolution sera-t-elle possible ? Probablement pas. A terme, si Google réussit son pari, un être humain qui refuserait d’être hybridé avec des circuits électroniques ne serait guère compétitif sur le marché du travail. Imagine-t-on une société à deux vitesses, avec des humains non augmentés qui deviendront inévitablement des parias ? En outre, serait-il éthique de ne pas augmenter les capacités cognitives des gens peu doués ?

Bill Gates lui-même est affolé par l’absence de réflexion politique sur les conséquences de la fusion de l’intelligence artificielle et de la robotique. Il estime que les automates remplaceront d’ici à 2035 la majeure partie des métiers, y compris les professions de santé. La montée en puissance des neurotechnologies inquiète au sein même de Google, qui vient de créer un comité d’éthique consacré à l’intelligence artificielle. Il devra réfléchir à des interrogations qui concernent l’humanité tout entière : faut-il mettre des limites à l’intelligence artificielle ? Comment la maîtriser ? Doit-on l’interfacer à nos cerveaux biologiques ?

Dans une tribune publiée le 1er mai dans The Independent, le physicien Stephen Hawking, le Nobel de physique Frank Wilczek, l’informaticien Stuart Russell et le physicien Max Tegmark estiment que « la réussite dans la création de l’intelligence artificielle serait le plus grand événement dans l’histoire humaine ». « Malheureusement, ajoutent-ils, ce pourrait aussi être le dernier, sauf si nous apprenons comment éviter les risques » engendrés par cette création. Ils regrettent que la recherche sur ces questions soit cantonnée à quelques institutions à but non lucratif.

Le fondateur de Deep Mind, récemment racheté par Google, qui est un leader de l’intelligence artificielle, affirme lui aussi que cette dernière peut menacer l’humanité dès le XXIe siècle. A l’ère des prothèses cérébrales, le risque de neuro-manipulation, de neuro-hacking et donc de neuro-dictature est immense. Nous devons encadrer le pouvoir des neuro-révolutionnaires : la maîtrise de notre cerveau va devenir le premier des droits de l’homme.

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