Bretagne. Une Américaine veut sauver notre patrimoine culinaire

Par Hélène Caroff

Olivia Noël est arrivée en France, il y a trois ans, dans le cadre de ses études d’ethnographie. Mais pas sur n’importe quoi : sur la nourriture de terroir ! Installée dans le Pays bigouden, elle a été marquée par l’homogénéisation dans nos assiettes. Et cherche à créer un blog pour sauver le patrimoine culinaire.

Bretagne. Une Américaine veut sauver notre patrimoine culinaire

On la retrouve dans un bar de Pont-l’Abbé (sud-Finistère), en fin de matinée d’un mardi pluvieux. Un « soda » – un diabolo grenadine – à côté d’elle, elle griffonne sur son carnet. En français et en anglais. « Je fais le point de ce que je vais dire ! », lance-t-elle sans presqu’aucun accent. Olivia Noël, née Zlamany il y a 25 ans dans le Connecticut, est américaine. Arrivée dans le sud de la France il y a trois ans, dans le cadre de ses études d’ethnographie au Hampshire College dans le Massachusetts, elle y a rencontré Camille, désormais son époux. Et l’a suivi dans le Pays bigouden voilà un an. La France ? Un paradis, pour elle, l’ethnographe spécialisée dans l’alimentation.

Des petits plats de résistance

Elle le dit clairement. « Aux États-Unis, nous avons une vision romanesque de la culture alimentaire européenne, enfin, la Française car l’Anglaise... ». Elle fait un petit signe de dégoût, avant de s’esclaffer. « D’ailleurs, nous utilisons le mot français "terroir" car nous n’avons pas d’équivalent dans notre langue, c’est lié à l’histoire des États-Unis. À part les oranges de Floride, nous n’avons pas vraiment de spécialités. Ce n’est pas pour rien que la gastronomie française a été classée comme patrimoine culturel immatériel à l’Unesco ! ». Une vision romanesque qu’elle a un peu perdue, en arrivant dans l’Hexagone. Adieu la vision des plats typiques, véhiculée par le tourisme. « C’est comme aux États-Unis : les gens préfèrent le rapide et le pas cher. Les gens ne cuisinent plus, notamment ceux de ma génération ». Cela l’a d’autant plus frappée que des enseignes ont lancé, voilà quelques années, des gammes de plats saveurs ou produits de nos régions. « C’est une appropriation du territoire et du terroir par les industriels », critique-t-elle. Elle fait la moue. « Les recettes sont industrielles, homogénéisées. Il n’y a plus la petite touche personnalisée qui donne souvent leur charme aux recettes ».

Certaines recettes sont en voie de disparition, comme le kouign plaked. Il ne faut pas que ça arrive !

Et tout ça fait peur à l’ethnologue épicurienne, amoureuse des produits du terroir, qui passe des heures dans sa cuisine à reproduire, à tester, à goûter les recettes traditionnelles, comme le kig ha farz, cher à son Nord-Finistérien de mari. « Certaines sont en voie de disparition, comme le kouign plaked, ici, dans le Pays bigouden. Il ne faut pas que ça arrive ! ». C’est pourquoi, en lien avec son université et l’Institut européen d’histoire et culture alimentaire de Tours, elle a décidé, en janvier, d’écrire une étude tentant de répondre à la question du futur des produits du terroir et des cultures régionales. Une étude qu’elle réalisera, dans un premier temps, sous la forme d’un blog, "Recipes for resistance".

Comme l’escargot qu’elle a tatoué sur son poignet, elle se concentrera d’abord sur le Finistère, notamment l’Ouest-Cornouaille. Avant d’élargir, par la suite, si le temps et les finances le lui permettent, au Pays Basque et à la Corse, puis de repartir aux États-Unis, des recettes dans ses bagages.

Une mine d'informations

En attendant, en bonne ethnographe, depuis son installation à Pont-l’Abbé à deux pas des places où se passe le marché hebdomadaire et où cette blonde vénitienne est désormais connue des commerçants, elle se rend dans tous les événements. « Je regarde, j’écoute, je discute, je mange », sourit-elle. « Il y a beaucoup de personnes âgées et elles sont une mine d’informations. Elles ne demandent souvent qu’à transmettre ». Elle a ainsi pu découvrir les kouigns, la miche beurrée, le choten, lors de festoù-noz ou d’un contrat dans une boulangerie de Kérity. Ou encore la préparation des huîtres et des coques. En échange d’une astuce, elle n’hésite pas à livrer la recette un peu traditionnelle du Massachusetts : le chowder. « Une sorte de soupe de palourdes, de crème, de pommes de terre et de poireaux », énumère-t-elle. « Ici, je mets des coques. Des fois, il faut savoir s’adapter au terroir dans lequel on vit ! ».

Contact : 06 77 81 68 74

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