L’application du protocole sanitaire nécessite-t-elle une modification du règlement intérieur ?

 

L’application du protocole sanitaire ne nécessite pas de modification du règlement intérieur puisqu’il s’applique durant la crise sanitaire et qu’il est la traduction des ordonnances relatives à l’état d’urgence sanitaire.

Cependant il n’est pas impossible que les chefs d’établissement, après consultation des conseils d’administration, rédigent un additif au règlement intérieur qu’ils devront transmettre préalablement aux instances académiques pour approbation.

Cet additif au règlement devra être porté à la connaissance des parents d’élève et prévoir au besoin des sanctions en cas de violation des dispositions… ce qui dans la période actuelle n’est pas simple.

Par ailleurs, il n’est pas recommandé, dans cette période d’inflation judiciaire, de se doter d’un règlement intérieur précis qui n’est pas indispensable puisque limité à la période de crise sanitaire.

Au surplus, cet additif au règlement intérieur peut devenir un moyen juridique qui sera opposé au chef d’établissement en cas de mise en cause administrative ou pénale.

 

Un chef d’établissement ou un directeur d’école peut-il décider de suspendre l’activité de l’établissement s’il se trouve dans l’incapacité de faire respecter le protocole sanitaire (manque de masques, de gel, etc.) ?

 

C’est une vive recommandation. Le directeur d’école en concertation avec le maire, le principal de collège avec le président du conseil départemental, le proviseur avec le conseil régional pourront suspendre l’activité de l’établissement après avoir exercé en cas de besoin une mise en demeure des collectivités et de l’administration d’avoir à fournir les moyens permettant les gestes barrières.

Ils seront d’ailleurs soutenus dans leur décision par des professeurs qui exerceront leur droit de retrait.

 

Si le conseil d’administration vote contre les mesures proposées par le chef d’établissement dans le cadre de l’application du protocole sanitaire, quelles peuvent être les conséquences ?

 

Le conseil d’administration peut s’opposer aux mesures proposées par le chef d’établissement et il revient à celui-ci de transmettre la décision négative du conseil d’administration auprès des autorités académiques, qui ne manqueront pas de valider et de donner autorité au protocole sanitaire proposé par le chef d’établissement à l’occasion du déconfinement.

Pour la suite, il convient de rappeler que le chef d’établissement est le représentant de l’État au sein de l’EPLE et qu’il ne peut refuser de mettre en place ces mesures s’il dispose des moyens de les mettre en œuvre ; instance d’autorité, il doit prendre toutes les dispositions pour assurer la sécurité des personnels, des élèves et des biens, l’hygiène et la salubrité des locaux scolaires.

Il a aussi l’ardente obligation de nouer le dialogue avec le conseil d’administration pour lui expliquer toutes les mesures susceptibles d’apaiser ses inquiétudes.

 

Un chef d’établissement peut-il rouvrir un collège ou un lycée sans internat ou demi-pension ?

 

S’il estime que les mesures d’hygiène, de salubrité et de sécurité au regard des barrières sanitaires ne peuvent être respectées, il lui revient, en concertation avec sa hiérarchie, de ne pas ouvrir l’internat ou la demi-pension. Sa décision, qui peut être également prise au regard du personnel dont il dispose et des élèves inscrits, devra s’appuyer sur toutes les instances de consultation prévues à cet effet. Les collectivités territoriales devront être également associées car leur responsabilité peut être engagée mais la décision finale reviendra au chef d’établissement qui en assumera la responsabilité.

 

Quelles responsabilités pour le chef d’établissement ou le directeur d’école en cas de non-respect des gestes barrières aux abords de l’établissement ?

 

S’ils n’ont pas de compétence à exercer la police de la rue aux abords de leur établissement, le directeur comme le chef d’établissement ne peuvent être indifférents à une situation qui serait de nature à faciliter la transmission de l’épidémie. Notamment si des gestes barrières sont prévus par les élus locaux et ne sont pas respectés. Il est recommandé en effet de signifier au maire de la commune et à sa hiérarchie toute difficulté par téléphone suivi d’un mail explicatif de la situation auprès du DASEN ou du recteur.

En cas de besoin, il a également la possibilité, en relation avec son administration, de saisir le préfet ou le préfet de police pour analyser la situation.

Cependant, les voies de la discussion avec les élèves et les parents d’élève sont à recommander en priorité car le confinement a naturellement provoqué des tensions.

 

Un chef d’établissement ou directeur d’école peut-il interdire à un personnel (ou un élève) l’entrée de l’établissement s’il a connaissance de symptômes médicaux et que la personne refuse de consulter un médecin ? Quelles précautions prendre ?

 

Idem si un élève ou un adulte refuse les gestes barrières (masque, règles d’hygiène, distanciation, etc.).

S’il a connaissance de symptômes médicaux, le chef d’établissement ou le directeur d’école en présence de ses collègues doit en principe inviter le personnel concerné à regagner son domicile et à se soumettre à un test de dépistage. Il peut mettre éventuellement à sa disposition l’infirmière qu’il aura sollicitée.

Il en va de même avec un élève, cas dans lequel la famille est informée sans délai de venir prendre en charge l’enfant. Généralement les protocoles sanitaires prévoient que l’élève soit confiné dans une salle prévue à cet effet en attendant sa prise en charge.

À l’occasion de ces circonstances délicates il convient de veiller à respecter les recommandations des protocoles sanitaires (mesures de confinement, etc). Il devra sans délai en informer sa hiérarchie et la collectivité territoriale concernée.

 

Quelles mesures d’urgence les directeurs d’école et les chefs d’établissement sont-ils conduits à prendre en cas d’accident sanitaire ?

 

Dès qu’une menace de contamination aura été déclarée, le maire et le chef d’établissement seront placés devant leur responsabilité d’urgence et n’hésiteront pas à procéder à la fermeture provisoire des locaux. Cette décision, prise dans des délais rapides, sera forcément mise à leur actif par les juges si leur responsabilité pénale venait à être engagée en raison de la mise en danger d’autrui.

 

Si un fonctionnaire de l’Éducation nationale est atteint par le virus dans l’exercice de son travail, bénéficiera-t-il d’une prise en charge au titre de la maladie professionnelle ?

 

Nous l’espérons, même si les textes actuellement ne le prévoient pas ; cependant ce débat a émergé à la suite des déclarations du ministre des Solidarités et de la Santé du 23 mars qui a précisé : « pour tous les soignants qui tombent malades, le coronavirus sera reconnu comme maladie professionnelle. »

À la suite de ces déclarations, les organisations syndicales notamment se montrent très actives auprès des pouvoirs publics pour que cette maladie professionnelle soit prise également en charge en faveur des fonctionnaires de l’Éducation nationale.

Il faut rappeler que la qualité de pupille de la nation vient d’être reconnue aux enfants des victimes du virus.

Enfin, l’idée de la création d’un fonds destiné à indemniser les victimes de façon simple et rapide fait son chemin. Il pourrait bénéficier aux salariés du privé, aux fonctionnaires et aux bénévoles qui ont apporté leur aide dans la lutte contre la pandémie.

 

Des personnels peuvent-ils refuser de reprendre les cours en présentiel au motif de leur propre état de santé dit « à risque » ?

 

Un médecin doit être consulté et il pourra accompagner le fonctionnaire en établissant un certificat médical permettant d’acter l’état de santé.

L’entrée dans les dispositifs qui seront encore en vigueur au moment de ces constats pourrait le cas échéant être mise en place, comme la poursuite du télétravail. Ces dispositions seront à convenir avec les autorités académiques en regard des dispositions gouvernementales.

 

Pourquoi pensez-vous que les élus comme les chefs d’établissement seront, durant cette période de crise, dans la même « chambrée » en matière de responsabilité pénale ?

 

Leurs missions et responsabilités sont différentes et les chefs d’établissement comme les directeurs d’école ont même le devoir d’interpeller, avec le soutien de leur administration, les élus et leur collectivité si leurs obligations ne sont pas remplies.

Cependant, durant cette période de crise sanitaire, ils auront à rechercher en permanence une collaboration dans l’intérêt de la santé et de la sécurité des personnes qu’ils ont à charge.

Paradoxalement leurs responsabilités pénales, même avec la loi Fauchon amendée, seront similaires, d’où l’image qu’ils se trouvent alors dans la même « chambrée ».