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Les Français dorment de moins en moins bien

Le passage à l'heure d'hiver n'est pas forcément synonyme de sommeil en plus.

Le passage à l'heure d'hiver n'est pas forcément synonyme de sommeil en plus. - jafsegal - Flickr - CC

Une heure et demie de sommeil en moins qu'il y a trente ans. Les Françaises et Français dorment de moins en moins et de plus en plus mal.

Nous dormons de moins en moins et de moins en moins bien. C'est le résultat d'un sondage mené au printemps dernier. Et nous plongeons chaque nuit dans les bras de Morphée une heure et demie de moins qu'il y a trente ans. Selon cette enquête réalisée par Opinonway pour la MGEN et l'Institut national du sommeil et de la vigilance (INSV), les Françaises et Français sommeillent en moyenne 6h41 en semaine et 7h33 le week-end.

Ce qui est loin d'être assez alors qu'un adulte devrait dormir au minimum sept heures par nuit pour être en bonne santé, explique Marc Rey, neurologue et président de l'INSV. "Il y a évidemment des gros dormeurs et des petits dormeurs, pointe-t-il pour BFMTV.com. Mais on estime qu'en moyenne, 30% de la population est en dette de sommeil."

Autre enseignement de l'étude: la moitié des personnes âgées de plus de 40 ans admettent que leur temps de sommeil a diminué au cours des vingt dernières années et que leur repos a perdu en qualité.

"Parfois, j'en pleure de rage"

C'est le cas de Maryse*, une retraitée de 74 ans, qui s'estime heureuse lorsque sa nuit cumule quatre heures de sommeil, "mais pas d'un coup", précise-t-elle. "Mon sommeil est complètement irrégulier, c'est n'importe quoi, regrette-t-elle pour BFMTV.com. Quand je ne me réveille que deux fois dans la nuit, c'est beau."

La septuagénaire qui vit en banlieue parisienne assure n'avoir "jamais bien dormi" et a vu ses nuits se dégrader à la naissance de son fils. Et depuis une dizaine d'années, avec l'âge et les ennuis de santé, elles ont périclité.

"Quand je me réveille dans la nuit, souvent je me demande quelle heure il peut être. J'espère qu'il est 6 heures du matin et que j'ai dormi plusieurs heures d'affilée mais non, il est 1h40 et je sais qu'il va me falloir plusieurs heures avant de m'endormir à nouveau. Il m'est même arrivé de voir le jour se lever sans avoir encore dormi. Parfois, j'en pleure de rage."

Le plus beau cadeau: "une nuit complète"

Et avec la pandémie de Covid, qui inquiète beaucoup Maryse, les choses ne se sont pas arrangées. "J'ai des palpitations dans mon lit et il m'arrive de me relever pour aller prendre ma température." Alors au bout d'une heure ou deux à lire, tricoter ou tourner en rond, elle avale une deuxième moitié de somnifère. Et c'est souvent au petit matin qu'elle parvient à "s'assoupir" quelques heures.

"Le plus beau cadeau qu'on puisse me faire, ce serait une nuit complète. Me coucher à 22 heures et me réveiller à 7 heures. Ça ne m'est pas arrivé depuis trente ans."

Pour le neurologue Marc Rey, l'endormissement est une étape qui se prépare. "Idéalement, c'est bien d'avoir un sas de décompression entre le moment où l'on décide d'aller se coucher et le moment où l'on éteint la lumière. On ne peut pas trouver le sommeil dans un état d'hyperstimulation." Il coneille ainsi la lecture, la musique ou la relaxation "pour mettre les sens au repos". Un bon sommeil passerait aussi selon lui par des rituels dès le lever: s'exposer à la lumière, faire de l'exercice, d'autant plus en cette période troublée par la Covid-19.

"C'est important de conserver un rythme veille/sommeil régulier, même si on travaille à la maison ou si on ne peut plus travailler. Ce qu'il faut proscrire à tout prix, ce sont les longues heures à somnoler sur le canapé."

Un couvre-feu numérique

Autre recommandation de ce médecin: respecter un couvre-feu numérique d'au moins une heure. Car l'un des principaux coupables de ces nuits sans repos, ce sont souvent les écrans. La moitié des adultes consultent un écran le soir au lit. Ce sont même près de deux jeunes de 18 à 34 ans sur dix qui reconnaissent être réveillés la nuit par leur téléphone. Pas mieux pour les enfants: à peine la moitié des parents leur interdisent d'utiliser smartphones, ordinateurs portables ou tablettes au lit. Et autant considère que les écrans n'ont pas d'effet sur leur sommeil. Ce qui est faux.

Car comme le rappelle Marc Rey, le président de l'INSV, la lumière bleue des écrans bloque la libération de mélatonine, qui régule le cycle veille/sommeil. "C'est une hormone de la nuit. Pour le cerveau, cela indique qu'il fait jour." Il pointe également des conditions de vie de moins en moins favorables à un sommeil réparateur.

"Le travail en horaire décalé a augmenté, tout comme les temps de trajets. Tout cela est pris sur le temps de sommeil avec davantage de possibilités de distractions, dont les écrans. Le temps qui leur est consacré n'a cessé d'augmenter."

"Je ne me suis pas rendormie avant 5 heures"

Claire*, une réalisatrice de 35 ans, connaît elle aussi des nuits agitées depuis le début de sa vie d'adulte. "J'en ai déjà parlé à un médecin qui a mis ça sur le compte de l'angoisse, témoigne-t-elle pour BFMTV.com. C'est vrai que j'ai tendance à cogiter. Mais même quand je ne me sens pas si mal, le sommeil reste problématique."

La jeune femme qui réside à Paris fait le compte: cinq heures de sommeil en moyenne par nuit avec plusieurs réveils, un peu moins selon son compagnon. "Cette nuit, à 2h30 je me suis réveillée. Je n'arrivais pas à me rendormir alors j'ai déménagé dans le salon. Je ne me suis pas rendormie avant 5 heures."

Pourtant, la jeune femme qui attend son premier enfant assure s'endormir facilement le soir. "Je n'entends pas mon conjoint se coucher. Il y a une petite période de grâce entre 23 heures et 1 heures. Mais après, je ne sais pas si je suis déjà à moitié réveillée, mais j'entends le moindre petit bruit." Alors évidemment, Claire est fatiguée.

"J'ai des gros coups de barre l'après-midi mais pourtant, le matin, je n'ai pas de difficulté à me lever. Je ne dis pas que je saute du lit mais quand le réveil sonne, je ne traîne pas et dans les minutes qui suivent je suis debout."

Agenda de sommeil et micro-sieste

À ces personnes aux nuits chahutées, Marc Rey conseille d'évaluer leurs besoins par un agenda de sommeil et de favoriser les siestes de récupération. "Sauf si évidemment vous avez une très grosse dette de sommeil ou que vous travaillez de nuit. Là, évidemment, une sieste de plusieurs heures s'impose."

Mais si ce n'est pas le cas, des micro-siestes de cinq à vingt minutes seraient à favoriser. "Elles permettent de lâcher prise, de reposer le système d'éveil pour le redémarrer. L'idée ce n'est pas d'avoir un sommeil long profond sinon évidemment, au réveil, vous vous sentirez plus fatigué qu'avant."

Claire quant à elle s'impose déjà un petit couvre-feu numérique et a aussi remarqué qu'en se couchant une heure plus tôt, ses nuits étaient moins mauvaises. "Mais c'est vrai qu'il y a quand même beaucoup de moments où je suis réveillée dans mon lit."

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https://twitter.com/chussonnois Céline Hussonnois-Alaya Journaliste BFMTV