Les erreurs à éviter quand on veut mêler lean management et usine 4.0
Une étude co-menée par La Fabrique de l’industrie s’est intéressée à la manière dont les entreprises industrielles sont passées au 4.0. Elle met en garde : la rationalisation des processus et l’adoption des nouvelles technologies ne peut fonctionner que si les employés sont impliqués et autonomes.
Comment les industriels adaptent-ils leur organisation pour améliorer leurs résultats ? Une étude menée par La Fabrique de l’industrie, en collaboration avec la chaire "Futurs de l'industrie et du travail - Formation, innovation, territoires" des MinesParisTech, a passé au crible les pratiques de 15 entreprises manufacturières. Constat : dans les PME comme dans les grands groupes, la rationalisation des processus et l’adoption des nouvelles technologies ne peut fonctionner que si les employés sont impliqués et autonomes. Deux exemples.
"Instrument de surveillance"
L’adoption du lean management par la PME Lippi, en 2003, se solde par un échec. Après une augmentation brève de la performance, elle retombe. Les contraintes de la rationalisation des flux, au long terme, plombent la motivation des employés qui se sentent "pris dans un étau de contraintes" : traque des temps morts, normes de productivité, manque de liberté… Il faut décloisonner l’organisation des usines en autonomisant les employés et en les impliquant dans la définition de la stratégie globale de l’entreprise. Le retour de la performance arrive avec une nouvelle organisation, constituée de petites équipes autonomes.
Même problème chez Michelin, qui adopte le lean au début des années 2000, sans accorder d’autonomie à ses équipes. La productivité augmente, la motivation dégringole. "La première vague de digitalisation avait mis en place un instrument de surveillance", est-il regretté dans l’étude. Face aux revendications des salariés, le groupe engage un large sondage auprès de ses opérateurs pour déterminer quel niveau d’autonomie leur accorder et met en place un nouveau système de management.
"L’autonomie des personnes constitue le socle"
L’erreur que Lippi et Michelin ont commise est la même : faire passer la rationalisation des process avant l’autonomie des opérateurs. "Travailler sur l’autonomie des personnes constitue le socle qui permet de fonder, dès le départ, un lean authentique faisant place à la participation active des opérateurs", préviennent les auteurs de l’étude, François Pellerin et Marie-Laure Cahier.
Cette nouvelle organisation, basée sur "le couple lean-autonomisation", permet alors une bonne appropriation des nouvelles technologies. Impliquer son personnel lors de l’introduction des nouvelles technologies permet de faciliter leur appropriation et de s’assurer de leur valeur sociale. "Dès l’instant où ce sont les employés qui ont décidé d’entrer une nouvelle technologie, il n’y a pas de problème, développe dans l’étude Frédéric Lippi, président de la PME éponyme. C’est choisi par le corps social."
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Au-delà de la recherche de performance, l’étude cherche à avertir sur les dangers de la numérisation de l’industrie : "Le risque est réel que la prescription technologique vienne encore réduire les marges de manœuvre des salariés si une grande vigilance n’est pas portée à ces questions. […] L’attractivité de l’industrie en dépend."
L'étude complète