Peut-on bien se nourrir pour vraiment pas cher? Peut-on participer à cette quête du mieux manger éthique, bio, propre et écolo si on n'a pas le budget pour acheter grand-chose de plus que des pommes de terre et des pois chiches?

La question a été soulevée récemment dans le grand forum de réflexion alimentaire Terroir, de Toronto. Et c'est une réponse à cette interrogation qui nous vient tout de suite à l'esprit quand on arrive chez Pushap, restaurant montréalais de cuisine punjabi végétarienne.

Le Pushap n'est pas à Outremont. Ni dans le Mile-End. Ni dans le Plateau ou le Vieux-Montréal. Il est aux abords de l'autoroute Décarie, là où Côte-des-Neiges n'a plus rien d'un village.

Petit, décoré de beaucoup de fleurs de plastique, c'est un lieu modeste qui pourrait être un peu plus astiqué, un peu plus coquet.

Mais la cuisine qu'on y sert illustre parfaitement l'idée qu'on peut manger savoureusement à partir d'ingrédients bon marché. Pommes de terre, choux-fleurs, pois chiches, lentilles, oignons. Les plats sont tous végétariens, tous remplis de parfums, éclatants en bouche. La cuisine, quand elle est soignée, quand elle est préparée avec respect et exigence, n'a pas à s'appuyer sur des ingrédients coûteux pour nous faire rêver.

Chez Pushap, on commence le repas par de classique pakoras, des beignets à base de légumes et de farine de pois chiches, bien pimentés. À tremper dans la sauce prévue plutôt pour les samosas, une sauce très épicée parfumée à la cannelle.

Les samosas sont aussi des amuse-bouche aux légumes (pommes de terre dans ce cas-ci), un peu plus dodus que les pakoras, moins pimentés. Ils sont farcis sans être frits, enrobés dans une pâte costaude qui rappelle celle des empanadas latino-américaines.

Le prix pour une assiette de six pakoras: 1,50 $.

En plats principaux, on choisit deux caris et un plat de purée de lentilles, le fameux dahl omniprésent dans ces régions. À 3,95 $, le baratha est un des plus spectaculaires et se concentre sous forme de mijoté savoureux: des aubergines, des oignons et de la tomate, dans des épices allant du garam masala au cumin, en passant par le gingembre. La combinaison est richement liée et se laisse manger toute seule avec un peu de riz basmati ou alors du pain indien. Le bhatura n'est pas le pain nan, mais plutôt un pain frit plus fade, moins sucré que le nan, mais aussi plus léger, légèrement gonflé.

L'autre plat de cari, un cari sec classique appelé alu gobhi, est plus costaud, très pimenté, jaune vif comme le curcuma, et met en valeur une combinaison toute modeste de pommes de terre et de choux-fleurs, avec un peu d'oignon.

Le troisième plat, les lentilles ­tarka, est richement épicé, mais se distingue des autres grâce à sa texture onctueuse, presque soyeuse. Les lentilles deviennent crème, montées au ghee, ce beurre clarifié où l'on commence par faire sauter les épices, dont les saveurs prennent ainsi toute leur ampleur. Le tout est bien pimenté, mais on adoucit le feu des papilles avec de bonnes bouchées de riz basmati et de bonnes rasades de lassi, ce lait fermenté, un peu comme du yaourt très liquide, à la mangue, très sucré.

Pour terminer le repas, difficile de ne pas essayer les créations qui sont en vitrine, sous la caisse, en arrivant. Des pâtes aux amandes, aux pistaches, créations aux allures de sucre à la crème qui se déclinent plutôt avec du­ fromage indien, de la farine de pois chiche, de la noix de coco. Colorées, onctueuses, ces pâtisseries ne brillent pas par leur légèreté, mais leur richesse et leurs couleurs, parfois vives, surprendront agréablement les amateurs de sucreries un peu robustes. Combien tout cela nous a coûté, pour quatre, tout, tout, tout inclus? Seulement 35 $.

Pushap

5195, rue Paré

Montréal

514-737-4527

pushaprestaurant.com

Prix : caris entre 2,50 $ et 3,95 $, entrées entre 1,50 $ et 2,99 $.

Repas complets pour 9 $ par personne ou 30 $ pour quatre personnes.

Carte de vins : Il n'y en a pas et on ne peut pas apporter son vin. En revanche, on peut commander pour emporter et prendre une bière avec son festin végétarien à la maison.

Atmosphère : Inexistante. On y trouve autant des étudiants fauchés que des grands-papas d'origine indienne. Beaucoup de fleurs en plastique.

Service : Minimaliste, mais courtois.

Point positif : Des plats végétariens très savoureux, à prix abordables, qui montrent que la vraie bonne cuisine végétarienne n'a pas à chercher à imiter les plats traditionnels.

Point négatif : Les gens du ménage pourraient frotter un peu plus fort.

On y retourne ? Bien sûr.