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Punkt de Pierre Lapointe, «fruit d’une collaboration passionnée»

Photo: Martin Laporte/collaboration spéciale

L’événement avec un grand E de Montréal en Lumière, c’est certainement le lancement très attendu de Punkt, le Pierre Lapointe nouveau. Métro a discuté avec l’artiste de cet opus éclaté, fruit d’un assidu «travail de gang».

«Cet album est le fruit d’une collaboration fort agréable et surtout passionnée entre Francis Beaulieu, Philippe Brault, Guido Del Fabbro, Michel Séguin et Pierre Lapointe», nous apprend cette fausse étiquette de mayonnaise (!) au début du livret de Punkt. C’est qu’on a ici affaire à un vrai travail d’équipe, nous explique Pierre Lapointe. D’ailleurs, le principal intéressé n’est pas avare de compliments envers ses collaborateurs, vers qui il redirige souvent le projecteur au cours de l’entretien : Émilie Laforest («elle et son groupe Forêt, avec son chum Joseph Marchand, et François Lafontaine de Karkwa, vont sortir leur disque bientôt, c’est vraiment hallucinant!»), Albin de la Simone («Il fait partie de ma famille parisienne») ou Simon Tremblay («C’est le leader des Amis au Pakistan, un des groupes les plus étranges que j’ai connus de ma vie. Ils sont super brillants et drôles!») Et, bien sûr, il ne tarit pas d’éloges non plus sur les réalisateurs de son disque, Philippe Brault et Guido Del Fabbro.

«C’est une des choses qui me rendent le plus fier, d’avoir réussi en 10 ans à monter une équipe aussi solide, résume Lapointe en évoquant ses réalisateurs. Et d’avoir réussi à élaborer une façon de travailler qui fait en sorte que j’aie l’impression que, chaque fois qu’on sort quelque chose, on avance, qu’on mène au bout les chansons, et que la plupart du temps, on a fait des choix très justes.»

La collaboration, à son avis, n’était peut-être jamais allée aussi loin avec ses vieux complices. «Pour chacun des choix qui ont été faits, on s’est demandé : “Est-ce qu’on va jusque-là; est-ce qu’on va à droite, à gauche; est-ce qu’on épure, est-ce qu’on amplifie?” Ce qui est l’fun, c’est que personne n’a d’ego entre Philippe, Guido et moi. On s’en fout de qui va avoir plus de crédit, on veut juste emmener la chanson le plus loin possible. Des fois, je sors une idée et les gars me regardent en riant; d’autres fois, ils ne sont pas sûrs, mais on essaie et finalement, ça fonctionne.»

Et c’est d’ailleurs pour cette raison que Lapointe continue de travailler avec eux, assure-t-il. «Je n’aime pas quand les gens sont trop complaisants, ne disent que “Ah, t’es tellement bon!” Il y a des move que je fais qui ne sont pas bons. Et c’est important qu’il y ait du monde qui me le dise, et c’est important de les écouter.»

Important, notamment, dans un album où l’artiste a choisi une direction artistique beaucoup moins sombre – la joyeuse intro instrumentale N2O suffit à le prouver – que pour son précédent opus, Sentiments humains. Et sur lequel il parle beaucoup d’amour. «Le défi, c’est toujours d’aborder des thèmes dont on parle depuis toujours sous un angle nouveau et sans tomber dans le quétaine, dit-il. C’est quelque chose de très délicat. La pièce Nu devant moi, par exemple, si on avait fait ça avec des guitares électriques et des cordes, à la Elton John, on aurait trouvé ça vraiment quétaine. Là, on est allés vers quelque chose de plus expérimental, à la Matthew Herbert. Cela dit, il y a des sonorités sur le disque qui sont totalement kitsch, et c’est très assumé. Ces choix-là ne sont pas innocents. Il y a plein d’éléments mis ensemble qui créent un équilibre.»

D’où l’importance d’avoir une équipe solide, on s’en doute : «Ça peut devenir délicat quand tu joues dans ces eaux-là, fait valoir le chanteur. Alors, on avait plein de “polices de chansons” qui s’assuraient que celles-ci ne partent pas n’importe où.»

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Et au-delà de ça, il y a ces collaborations auxquelles tient tant Pierre Lapointe – et pas seulement celles de Punkt, mais aussi toutes celles avec des gens avec qui il a travaillé sur les divers projets auxquels il a pris part ces dernières années, que ce soit une installation au Musée des beaux-arts avec l’architecte Jean Verville, ou le projet multidisciplinaire Conte crépusculaire avec David Altmejd, entre autres choses.

«Je pense que ce qui m’a nourri beaucoup dans ces autres projets, c’est surtout de côtoyer d’autres créateurs, de voir comment ils pensent, jusqu’où ils sont prêts à aller, jusqu’à quel point ils sont libres, énumère Lapointe. C’est une comparaison, pas une compétition, mais ça t’oblige à regarder comment, toi, tu agis. Et dans le livret, j’ai inclus quelques petites dédicaces, à Fanny Britt, à Claude Poissant, un petit clin d’œil à Shary Boyle… ce sont tous des artistes qui m’ont marqué et qui ont fait en sorte que j’écrive deux, trois chansons. Et je pense que ça se sent sur le disque, l’espèce d’éclatement qui est dû beaucoup à ces relations que j’ai entretenues, à ces voyages que j’ai faits, à cette espèce de situation de surprise dans laquelle je me mets pour écrire.»

Une première
Contrairement à son habitude, Pierre Lapointe a cette fois enregistré Punkt avant d’en faire un spectacle. Rappelons-nous de :

  • Pierre Lapointe (2004). La sortie de l’album avait été précédée du spectacle Petites chansons laides, en novembre 2002.
  • La forêt des mal-aimés (2006). En 2004, Lapointe avait déjà présenté une version renouvelée de son spectacle, intitulé La forêt des mal-aimés, comme l’album pour quelque temps plus tard.
  • Sentiments humains (2009). Le troisième album studio faisait suite au spectacle multidisciplinaire Mutantès, créé pour les FrancoFolies 2008.
  • Pierre Lapointe seul au piano (2011). Après avoir lancé sa tournée solo à Coup de cœur francophone en 2009, c’est début 2011 que Pierre Lapointe en a fait un album, enregistré live quelques mois plus tôt.


Faites l’amour, pas la guerre!

C’est un Pierre Lapointe un peu moins abstrait que d’habitude qui se révèle sur Punkt. Avec des textes tantôt joyeux («Je t’ai donné mon coin de ciel / Tu m’as donné ton cœur de miel / et nous sommes depuis tous les deux / sur l’étrange route des amoureux»), tantôt mélancoliques («Promis, je ne te dirai pas Je t’aime / Mais laisse-moi dormir nu dans tes bras»), mais surtout, qui tournent souvent autour du… sexe!

«En mettant mes chansons en relief, j’ai réalisé que je parlais beaucoup de sexe… et je trouvais ça assez drôle, avoue le chanteur. Ça m’a semblé intéressant de traiter de sexe en chanson comme on le ferait au cinéma, en art contemporain ou au théâtre, où on le fait avec des mots assez crus et que ça passe. De son côté, la chanson est devenue un peu gentillette. C’est rendu mal vu de faire des choses qui brassent un peu.»

C’est donc dans le but d’utiliser la chanson «comme un véritable mode d’expression et de l’élever un peu plus haut que des chansons cutes ou des chansons drôles ou des chansons tristes» que Lapointe a écrit des chansons comme Nu devant moi ou La sexualité, co-écrite avec le groupe Random Recipe. «Quoique cette chanson-là, c’est une grosse joke, lance-t-il. C’est une hymne à la monogamie, en quelque sorte, mais il y a quelque chose d’un peu con… du rap sur une chanson de Pierre Lapointe, c’est n’importe quoi!»

Random Recipe
Le groupe Random Recipe / collaboration spéciale

Néanmoins, l’envie d’exploiter une certaine forme d’impudeur était bien présente sur cette chanson qui dit «à ceux qui veulent partir au loin / pour tuer nos frères en faisant la guerre : / C’est bien mieux de faire l’amour / Pénétrer autrui, le jour, la nuit, sans cesse et sans répit»!

«C’était très fréquent de parler de sexualité dans la chanson francophone dans les années 1940-50-60, et ça s’est perdu à la fin des années 1970, rappelle Lapointe. Je trouve ça intéressant de revenir avec ce genre d’esthétique-là. Et puis, le sexe, ça fait partie de nos vies. Même si ça n’habite pas notre quotidien, on y pense au quotidien!»

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