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C’est terminé! Vous avez bien travaillé, vous êtes, scientifiquement, allés aussi loin que vous le pouviez dans cette enquête. Il reste à obtenir leurs aveux, mais ce n’est plus de votre ressort. Si vous ne voulez pas connaître tout de suite la fin de l’énigme, n’allez pas plus loin dans ce texte et rendez-vous plutôt aux épisodes précédents: un, deux et trois.

C’est fou ce que de petites taches de sang peuvent révéler. Comme nous l’expliquait (voir les commentaires du premier texte) l’expert en sciences judiciaires François Julien —c’est lui qui a préparé cette scène de crime— les projections de sang sur le mur du cabanon indiquaient le nombre de coups portés à la victime. Mais avec quelle arme? Et qui, parmi les trois suspects?

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Les résultats préliminaires de l’autopsie (voir le 2e texte) ont révélé deux types de coups, avec un délai entre les deux: dans un premier temps, un objet contondant qui a frappé à la tête; dans un deuxième temps, le coup mortel, avec un objet tranchant. L’objet contondant est vraisemblablement —des analyses ultérieures le confirmeront— le marteau retrouvé dans le coffre à outils (voir le 3e texte). Et c’est aussi, selon toute vraisemblance, le marteau qui a laissé une trace de sang sur la chaise, à l’intérieur de la cabane.

Dès lors, qui pouvait être directement relié à cette séquence d’événements? C’est là que les taches de sang sur les vêtements devenaient l’élément-clef pour la résolution de l’énigme. Les taches de sang sur les vêtements de la femme et du fils (voir le 3e texte) ne collent pas avec le seul fait d’avoir voulu porter secours à la victime ensanglantée, comme ils le prétendent. Les vêtements de la femme indiquent plutôt une projection de sang, qui est compatible avec les coups de marteaux.

Le premier coup a été donné par l’épouse à l’extérieur de la remise ce qui a provoqué la chute au sol du mari. Les autres coups ont été donnés par l’épouse alors qu’elle était agenouillée, face à la remise, le corps de son mari à sa droite… Son genou droit par terre (il y a une projection uniquement sur la cuisse droite), elle le retenait par terre avec sa main gauche (projections fines sur le poignet gauche) et son pied gauche était près de la tête (projections fines sur le bas blanc, le bas de la jambe gauche du jean et le côté intérieur du soulier gauche).

Le marteau a ensuite été déposé sur la chaise, à l’intérieur de la remise, et une personne est entrée dans la remise après l’agression, comme l’indique la trace de pas ensanglantée, pour ramasser le marteau et le cacher dans le coffre à outils, avec le couteau, après lavage. Puisque les deux armes ont été lavées, une analyse des lavabos de la maison s’impose.

Les vêtements du fils l’incriminent aussi —il ne pouvait pas être à proximité de son père lorsque les coups de marteau ont été portés (aucune projections fines), mais il est vraisemblablement celui qui a donné le coup de couteau mortel. Le père, qui avait perdu conscience, est revenu à lui. Il a repoussé le fils, le fils a pris un couteau qui traînait sur la table, a poignardé son père droit au cœur, ce qui a provoqué des projections. Après un court moment, il a récupéré le couteau et le marteau, est allé dans la salle de bain pour les laver et les a cachés dans son véhicule. Le téléphone au 911 est fait par la suite. Avec ces éléments en main, vous avez de quoi cuisiner les deux suspects.

Quant à Scarlett, les taches de sang sur ses vêtements sont compatibles avec sa déclaration. Sur ses vêtements, on voit des contacts d’une main ensanglanté (chemise et poche droite du pantalon). Aucune projection artérielle ou goutte fine de projections par impacts.

Et bravo aux internautes qui ont osé participer, dont les tenaces Sylvain Morin, Marie Tremblay, TifTif3 et Leterrier.

François Julien, pionnier des sciences judiciaires

François Julien, qui a préparé cette scène de crime, a été biologiste judiciaire au Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale de Montréal. Il a une formation en microbiologie et immunologie, et au cas où vous ne l’auriez pas deviné, une de ses spécialités est... l’étude des projections de sang!

En fait, il est le premier au Québec à avoir développé cette spécialité —et il a fallu du temps, raconte-t-il, avant que les policiers n’admettent qu’elle était essentielle à la résolution de leurs enquêtes.

Il a analysé plus de 700 scènes de crime pendant ses 35 années d’enquêteur. Comme quoi la chose ne l’a pas trop traumatisé, il donne des conférences et en mai prochain, pour la deuxième fois, il préparera une scène de crime, dans le cadre du festival de littérature policière Les Printemps meurtriers, à Knowlton.

Comment a-t-il créé notre scène de crime fictive? Un marteau et un petit contenant rempli de sang: car ce que vous avez vu au sol et sur le mur, c’est vraiment du sang... de boeuf. En plus d’une trace de doigts ensanglantés sur le cadre de la porte et d’une trace de pas dans la remise. Tout cela semble simple, mais a dû être préparé avec minutie pour correspondre à ce qu’aurait été une véritable scène de crime. Ça vous a plu?

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