Les impacts de la transformation numérique sur l’emploi

Orange organisait hier matin dans le cadre du Digital Society Forum une grande table ronde sur une problématique amenée à devenir centrale dans les années à venir : la transformation du marché du travail par les nouvelles technologies. Les formes de travail sont en effet amenées à changer au gré des évolutions technologiques. La structure même du corps salarié peut à termes être remise en question. Pour réfléchir à ces problématiques, Orange et son PDG Stéphane Richard avaient invité plusieurs personnalités très bien placées pour s’interroger sur ces questions : Frédéric Mazella, CEO de BlaBlaCar, Philipe Aghion, économiste et professeur au Collège de France, Augustin Landier économiste, Céline Lazorthes, fondatrice de Leetchi, Sébastien Bazin, PDG d’Accor et Georges Plassat, PDG de Carrefour.

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Destruction créatrice ou destruction ?

Un rapport alarmant publié pendant le Forum Economique de Davos annonce que le numérique et l’automatisation de ce que l’on peut appeler la 4ème révolution industrielle entraîneront une perte de 7,1 millions d’emplois. Perte qui ne sera que partiellement compensée par la création de 2 millions d’emplois. Un solde net très largement déficitaire et qui pourrait annoncer une tendance de fond. Selon l’universitaire Augustin Landier « beaucoup d’emplois de milieu de gamme, par exemple dans les cabinets d’avocats disparaissent déjà, et cela continuera chez les cols blancs. Il y a moins d’intermédiation, et plus d’automatisation, donc moins d’emploi. Quels emplois se développent ? Les emplois très qualifiés de management et de top management et le travail peu qualifié, comme dans le service à la personne. » Néanmoins, il convient de ne pas être trop pessimiste puisque ces changements technologiques ont toujours été vus comme des dangers. Comme le rappelle Philipe Aghion « l’invention de la machine à vapeur et plus tard de l’électricité ont été vues à l’époque comme un danger pour l’emploi. Et pourtant nous constatons que le progrès technique à créé de l’emploi. Il faut que le système économique et éducatif s’adaptent à ces nouvelles technologies« . Une tendance confirmée chez Orange où le numérique crée de nouveaux emplois : web conseillers, cyber sécurité, big data, objets connectés… Face à ces changements de paradigme, il faudra donc privilégier l’éducation. Frédéric Mazella affirmant qu’il est indispensable d’apprendre aux enfants à coder dès l’école. Tous les observateurs réunis s’accordant aussi à dire qu’il faut réformer la formation professionnelle. Un système qui coûte cher et qui ne profite pas aux chômeurs.

Quelle transformation digitale pour les grands groupes

Autre enjeu du numérique pour les entreprises : leur transformation, notamment au niveau RH. Le numérique a permis l’émergence de rivaux très puissants, voire monopolistiques, en très peu de temps. Sébastien Bazin rappelle qu’Expedia, Booking ou Airbnb ont atteint une puissance que les acteurs traditionnels du secteur ont mis 50 ans à atteindre… Pour mieux appréhender cette transformation de l’environnement, le problème de l’âge des dirigeants et de l’inertie des organisations se pose. Pour y répondre, « Accor a créé un Shadow Comex constitué de 12 personnes de moins de 35 ans » (et majoritairement féminin, c’est assez rare pour être signalé). Autre solution pour les grands groupes : travailler main dans la main avec les start-up de leur secteur pour se digitaliser. C’est par exemple le choix du Crédit Mutuel Arkea qui a racheté Leetchi.

La transformation digitale passe aussi par une évolution du management et de la formation des salariés. Chez Orange, la moyenne d’âge est de 48 ans. Il faut donc former tous ces salariés aux nouveaux enjeux du numérique. C’est un chantier majeur mis en place par l’entreprise via la création de modules de formation.

Un encadrement du travail à repenser

Le conflit entre les VTC et les taxis est la parfaite illustration d’une structuration du travail peu adaptée aux nouveaux modèles. Il va falloir totalement repenser le code du travail pour cette nouvelle génération de « slachers », de « freelances » ou d’auto-entrepreneurs. C’est notamment ce que défend Philipe Aghion : « il faut moderniser contrat de travail pour réconcilier sécurité et flexibilité. Les 30 glorieuses ont créé un modèle où on passait toute sa vie dans même entreprise. L’organisation de la société s’est faite ainsi. Maintenant il faut adapter la sécurité sociale, l’assurance maladie et le code du travail pour permettre flexibilité et sécurité. L’emploi dans les entreprises ne disparaîtra pas, mais les gens alterneront sûrement emploi salarié, et emploi personnel. Mais il faut un système pour cadrer ça. Il faudra alterner période de travail, période de formation voire de reconversion. Cela implique la garantie d’un revenu pendant la formation. Il faudra aussi revoir tout le système de formation inefficace, mais qui coûte pourtant 34 milliards d’euros en France… »

Quel équilibre vie pro / vie perso ?

La transformation numérique implique aussi une nouvelle organisation du travail au sein même des entreprises. L’entreprise doit s’adapter et devenir plus « libérée » pour ses salariés. Mais il ne faut pas non plus perdre de vue l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle qui sera un enjeu important des années à venir. Avec le Bring Your Own Device, les salariés ont leur propre terminal au travail, mais cela constitue un lien permanent avec le bureau. Il ne faut pas, selon Stéphane Richard, tomber dans une forme « d’esclavage numérique ». Pour Frédéric Mazella, il faut aussi réorganiser son travail, « ne pas culpabiliser quand on ne répond pas à un mail. Il est nécessaire de ne pas faire tout ce que les autres attendent sinon on finit par s’oublier. La tendance forte sera la création de zones de non communication. Cela permet de récupérer, de se déconnecter pour penser aux sujets de fond et ne plus être victime de l’immédiateté. »

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