Cet article vous est offert
Pour lire gratuitement cet article réservé aux abonnés, connectez-vous
Vous n'êtes pas inscrit sur Le Monde ?

Le chauffage au bois, recours face à la baisse annoncée de la production électrique

Près d’un tiers du parc nucléaire français est indisponible. Le Syndicat des énergies renouvelables prône le développement de la filière bois pour l’hiver.

Par 

Publié le 15 novembre 2016 à 06h44, modifié le 15 novembre 2016 à 11h28

Temps de Lecture 4 min.

Pour ne pas grelotter cet hiver, la France va devoir faire feu de tout bois, au sens propre. Le Réseau de transport d’électricité (RTE), la filiale d’EDF qui gère les lignes à haute tension, a annoncé qu’il se préparait à une saison hivernale tendue. Cela, en raison de l’indisponibilité de près d’un tiers des cinquante-huit réacteurs du parc nucléaire hexagonal, actuellement à l’arrêt du fait de diverses défaillances ou de contrôles imposés par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). « La sécurité d’approvisionnement électrique de l’hiver 2016-2017 s’annonce plus délicate à assurer que lors des hivers précédents », a-t-il prévenu, en envisageant des « mesures exceptionnelles » telles que des délestages.

Dans ce contexte, « le chauffage au bois présente des atouts essentiels », fait valoir le Syndicat des énergies renouvelables (SER), qui dressait, mardi 15 novembre à Paris, un bilan de l’état de développement de cette filière. Certes, les cheminées domestiques ne se substitueront pas aux réacteurs nucléaires. Mais sans elles, souligne l’organisation professionnelle, la situation serait encore plus critique.

Huit millions de foyers

On l’ignore souvent, le chauffage au bois constitue aujourd’hui la première ressource énergétique renouvelable utilisée en France, devant l’hydroélectricité. Quelque 8 millions de ménages sont équipés de cheminées à foyer fermé ou à insert, ou encore de poêle, cuisinière ou chaudière fonctionnant avec des bûches ou des granulés de bois – dans 80 % des cas en complément d’un autre mode de chauffage. Un chiffre qui était de 5,7 millions voilà dix ans et que le Grenelle de l’environnement, en 2007, a prévu de porter à 9 millions à la fin de la décennie en cours.

Or, de façon tout aussi méconnue, ce mode de chauffage contribue fortement à réduire la demande d’électricité lors des pics de consommation des mois de novembre à mars. Durant les mois les plus froids, le surcroît de besoin en électricité, pour chauffer les logements et les maisons individuelles, mobilise une capacité de production moyenne journalière de 20 gigawatts (GW).

Sur la même période, l’apport du chauffage au bois domestique est estimé entre 5 et 10 GW. Sans lui, il faudrait augmenter d’autant la puissance électrique appelée, en faisant appel soit aux réacteurs nucléaires – lorsqu’ils sont opérationnels –, soit aux barrages hydroélectriques, aux centrales thermiques au fioul ou au charbon, ou encore aux importations.

Pointe de consommation électrique en fonction de la température

« Le chauffage au bois constitue une solution performante et indispensable pour maîtriser la pointe de consommation d’électricité, surtout en cas de faible disponibilité du parc électrique », commente Damien Mathon, délégué général du SER. Le syndicat professionnel veut donc encourager le recours des ménages français à cette énergie, aujourd’hui freinée par le faible prix du fioul et les températures relativement clémentes des derniers hivers.

Il préconise notamment que la création d’un conduit de fumée dans les habitations soit « éligible aux aides publiques » et que cet équipement soit prévu dans les maisons neuves. Il invite également les collectivités locales à « lancer des opérations de renouvellement du parc installé ». Il souhaite encore que soit instaurée « une prime à la casse pour les vieux appareils de chauffage au bois », et que le taux de la TVA sur les combustibles bois soit abaissé « de 10 % au taux réduit de 5,5 % ».

Il en va, plaide le SER, de l’avenir d’une filière qui représente aujourd’hui « près de 20 000 emplois directs et indirects », dont environ 8 000 dans la production et la distribution de bûches et de granulés, autant dans la fabrication d’appareils (foyers, inserts, conduits, vitres...) et 4 000 dans la vente d’équipements spécialisés.

Pression sur la forêt

Reste la question, controversée, du caractère écologique de ce moyen de chauffage. Le SER ne promeut évidemment pas les cheminées à foyer ouvert, dont les fumées sont chargées de particules fines polluantes et toxiques. Il pousse uniquement les modèles à foyer fermé ou à insert, qui bénéficient du label « Flamme verte » mis en place en 2000 par les industriels, avec le concours de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). Sur les appareils les plus performants, souligne le syndicat, les émissions de monoxyde de carbone (CO), de même que le niveau de particules fines, ont « largement diminué » depuis plusieurs années.

Newsletter
« Chaleur humaine »
Comment faire face au défi climatique ? Chaque semaine, nos meilleurs articles sur le sujet
S’inscrire

Lire aussi : Les feux de cheminée sont-ils si polluants ?

Mais qu’en est-il de la pression sur la ressource forestière ? Chaque année, 50 millions de m3 de bûches et 1 million de tonnes de granulés sont brûlés dans les appareils de chauffage domestique. Ce sont, pour l’essentiel, des déchets et des sous-produits de l’exploitation forestière et de l’industrie du bois. « La récolte annuelle de bois est inférieure à la production de la forêt française, dont la superficie continue de croître, rappelle Damien Mathon. On récolte environ 60 millions de m3 par an, soit 60 % de ce qui pousse chaque année. » Dans ces conditions, la ressource est préservée et la combustion du bois n’émet pas davantage de CO2 que la croissance des arbres n’en absorbe.

Membre du Réseau action climat et du Réseau pour la transition énergétique, Anne Bringault est plus nuancée. « D’un point de vue environnemental, le combustible bois peut remplacer avantageusement d’autres modes de chauffage, estime-t-elle. Mais une exploitation forestière durable exige de laisser du bois mort pour favoriser la biodiversité. Et l’approvisionnement doit être local, avec des circuits de distribution courts. »

Coordinatrice du réseau forêt de France nature environnement, Julie Marsaud est quant à elle dubitative. « Le bois est certes une ressource renouvelable, mais elle n’est pas inépuisable, explique-t-elle. La partie des domaines forestiers aujourd’hui non exploitée est souvent d’accès difficile. Accroître l’utilisation du bois énergie peut donc être incompatible avec une gestion forestière durable. » Et d’ajouter : « Au niveau tant économique qu’écologique, on ne fait pas pousser une forêt pour le bois énergie, pas plus qu’on ne plante des pommes de terre pour valoriser les épluchures. » En tout état de cause, le bois de chauffe n’empêchera pas le coup de froid de la filière nucléaire.

Lire aussi : La biomasse, dévoreuse de terres agricoles et de forêts ?

L’espace des contributions est réservé aux abonnés.
Abonnez-vous pour accéder à cet espace d’échange et contribuer à la discussion.
S’abonner

Voir les contributions

Réutiliser ce contenu

Lecture du Monde en cours sur un autre appareil.

Vous pouvez lire Le Monde sur un seul appareil à la fois

Ce message s’affichera sur l’autre appareil.

  • Parce qu’une autre personne (ou vous) est en train de lire Le Monde avec ce compte sur un autre appareil.

    Vous ne pouvez lire Le Monde que sur un seul appareil à la fois (ordinateur, téléphone ou tablette).

  • Comment ne plus voir ce message ?

    En cliquant sur «  » et en vous assurant que vous êtes la seule personne à consulter Le Monde avec ce compte.

  • Que se passera-t-il si vous continuez à lire ici ?

    Ce message s’affichera sur l’autre appareil. Ce dernier restera connecté avec ce compte.

  • Y a-t-il d’autres limites ?

    Non. Vous pouvez vous connecter avec votre compte sur autant d’appareils que vous le souhaitez, mais en les utilisant à des moments différents.

  • Vous ignorez qui est l’autre personne ?

    Nous vous conseillons de modifier votre mot de passe.

Lecture restreinte

Votre abonnement n’autorise pas la lecture de cet article

Pour plus d’informations, merci de contacter notre service commercial.