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Formation professionnelle: pourquoi le projet de réforme est décevant

LE MACRONOMÈTRE - Le second pan du projet de loi «pour la liberté de choisir son avenir professionnel» est une réforme de la formation professionnelle. Le «Macronomètre», l'outil d'évaluation de l'iFRAP, lui attribue une note de 5/10. Chaque semaine, le think-tank libéral publie sur Le Figaro.fr une évaluation d'une des mesures du président de la République.

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Après l'apprentissage, le second pan du projet de loi «pour la liberté de choisir son avenir professionnel» est une réforme de la formation professionnelle.

Aujourd'hui, la France dépense plus de 25 milliards d'euros pour la formation professionnelle, une somme dont la bonne utilisation est à mettre en doute alors que nous sommes l'un des derniers pays européens où le chômage ne baisse pas (ou si peu) et où nombre d'entreprises n'arrivent pas à recruter. Les entreprises dépensent plus de 12 milliards d'euros au total dont 4,45 milliards de fonds mutualisés et 6,2 milliards de financements directs, ce qui représente 2,6% de leur masse salariale quand l'obligation de financement est de 1%.

C'est d'ailleurs l'un des points décevants de la réforme proposée par le gouvernement. La nouvelle taxe «apprentissage-formation professionnelle» qui va être créée conserve ce taux de 1% pour la part formation professionnelle. Un taux que le gouvernement s'engage à ne pas augmenter. Sauf que, on l'a vu, l'effort des entreprises françaises en faveur de la formation professionnelle est aujourd'hui de 2,6% de la masse salariale en moyenne… Cela parce que nos entreprises font de plus en plus le choix de former elles-mêmes leurs salariés en plus des obligations légales… 2,6%, c'est 1 point de plus que la moyenne européenne et c'est aussi l'équivalent de l'obligation de financement. En supprimant cette obligation, les entreprises françaises continueraient de financer la formation professionnelle à hauteur de la moyenne européenne. Une piste que le gouvernement n'a pas voulu envisager.

Néanmoins, il faut souligner la bonne idée de cette réforme, qui est la collecte de la nouvelle taxe «apprentissage-formation professionnelle» directement par les Urssaf et non plus par les OCPA (Organismes collecteurs agréés). Cela englobe la contribution obligatoire à 1%, la part Quota et la part régionale de la taxe d'apprentissage et ce pour un périmètre actuel total de 6,5 milliards d'euros. À côté, la contribution légale particulière due par les entreprises du BTP pour la formation professionnelle est maintenue.

Seulement voilà, probablement pour ne pas froisser les syndicats, les OPCA, désormais vidés de leur mission de collecte, vont quand même être maintenus et transformés en «opérateurs de compétences». Ils seront chargés d'une mission assez floue d'appui technique aux branches professionnelles pour la mise en œuvre de leurs politiques conventionnelles. Cela évite ainsi au gouvernement de devoir aborder la très sensible question de la suppression des mandats paritaires… Question qui aurait dû être le corollaire de la suppression de la mission de collecte des OPCA.

Timide aussi, la décision du passage des crédits du CPF (Compte personnel de formation) d'heures en euros. C'est une bonne innovation mais on peut aller beaucoup plus loin et sortir du côté virtuel du CPF en proposant que ce compte ne reste pas «virtuel» mais soit un vrai compte en euros, accessible et liquidable par les actifs à chaque moment de la carrière et récupérable au moment du départ en retraite. D'ailleurs, la complexité des flux de financement à distribuer entre plan de formation, FPSPP, CIF et CPF reste ubuesque. Rationaliser les circuits de formation à deux devrait être un objectif, par exemple entre des formations personnelles (CPF) et des formations à la demande de l'employeur (collectives ou individuelles).

Il faut légitimement aussi regretter que la réforme ne concerne que les demandeurs d'emploi et les actifs du privé et non pas le secteur public, malgré les nombreux dysfonctionnements tels que l'opacité des flux financiers et la confusion des rôles entre organismes collecteurs et organismes formateurs. Opérer un rapprochement entre la formation professionnelle des actifs du privé et du public aurait aussi été préférable pour corriger les inégalités de traitement. Ainsi, il est dépensé 1500 euros en moyenne pour la formation professionnelle d'un agent de la fonction publique (toutes fonctions publiques confondues), contre 1350 euros pour un actif du privé.


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Le Macronomètre, observatoire des réformes du gouvernement, est un site de la Fondation iFRAP en partenariat avec Le Figaro.fr. Il s'agit d'un outil dédié à l'évaluation du quinquennat d'Emmanuel Macron: évaluation économétrique par rapport à son programme électoral et aux annonces de son gouvernement. Avec Le Macronomètre, l'action du gouvernement est notée sur 10 chaque mercredi avant le conseil des ministres et devient lisible d'un seul coup d'œil. Le Macronomètre permet à chacun de se faire un avis sur la tenue ou non des promesses du président de la République et sur l'efficacité des réformes du gouvernement.

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27 commentaires
  • Enigmatique

    le

    Pourquoi un journal de référence comme le Figaro s’acoquine avec l'iFRAP, qui ne s'appuie sur aucune expertise scientifique ?

  • 57chris-moselle

    le

    L'état ne soutient pas les filières par apprentissage; pas plus que les formations initiales par ailleurs.
    La formation n'a jamais été et ne sera jamais la priorité des politiques.
    Je suis enseignant en IUT.
    Nous avons mis en place l'apprentissage en 1èreA. puis en 2nde A. suite à la demande croissante des industriels et des étudiants.
    En retour, la dotation de fonctionnement versée par l'état...continue de diminuer un peu plus chaque année,
    soit environ -10 %.
    La gestion humaine n'est plus assurée pour autant puisque les départs en retraite ne sont plus remplacés... C'est dire toute l'importance accordée à la formation en France !

  • 57chris-moselle

    le

    Quand on observe la gouvernance de l'Ifrap, on remarque surtout la présence de hauts cadres du secteur privé français. Sur les onze membres actuels de son conseil d’administration (hormis le commissaire du gouvernement, qui représente l’Etat), on dénombre… neuf dirigeants ou retraités d'entreprises françaises importantes. 108ème fortune française Parmi eux, quelques mastodontes. Le président du conseil d’administration, Jean-Claude Rouzaud est l’ancien Président du groupe prospère Champagne Louis Roederer et un habitué des classements des Français les plus riches. Son fils, Frédéric Rouzaud, à qui il a légué l’essentiel de ses biens, est aujourd’hui considéré par Challenges comme la 108èmefortune française, avec 785 millions d’euros de richesses. Denis Kessler, personnalité qualifiée, est lui PDG du groupe de réassurance Scor, coté au CAC Next 20, l’indice boursier qui regroupe les vingt valeurs qui suivent celles du CAC 40. Son chiffre d’affaires 2016 avoisine les 14 milliards d’euros.

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