« C’est le grand soir ! », s’est enthousiasmé, lundi 15 janvier, l’un des « socios » (abonnés qui ont versé au moins 55 euros) du nouveau média alternatif de gauche Le Média, quelques minutes avant le premier journal télévisé de 20 heures, diffusé en accès libre.
Mais ce fut d’abord une déconvenue technique. Pour ceux qui étaient restés sagement sur le site lemediatv.fr, il fut impossible de visionner le programme. Trop de monde ? « Mauvais début. J’ai été incapable de me connecter ou de voir quoi que ce soit sur ce site. Et je ne dois pas être seul. Pas cool du tout », s’est ému un autre socio.
Pendant ce temps, sur TF1, Gilles Bouleau annonçait ses titres : « Adieu APB, bonjour Parcoursup », « Comment supprimer les passages à niveau dangereux ? », « Tout savoir sur l’intelligence artificielle », « La folie des repas livrés à domicile »… Sur France 2, Anne-Sophie Lapix promettait des sujets sur les ventes record du groupe Renault grâce à l’Asie, sur la taxe d’habitation en France et sur de nouveaux Calais en perspective.
Peu révolutionnaire
Pour découvrir les sujets du Média, il a fallu migrer sur YouTube et Facebook. Après avoir déclaré : « Nous sommes le 15 janvier 2018. Le “20 heures” s’est échappé de la télé, vous regardez le tout premier journal du Média », Aude Rossigneux les a présentés : l’inégalité salariale, les récentes manifestations en Iran – « un presque printemps » – et les « exilés » en Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA), là où des militants aident les réfugiés dans la vallée de la Roya (Alpes-Maritimes).
Outre le choix des titres, la deuxième différence marquante avec les autres chaînes est l’absence, faute de moyens, de reportages. Pendant les trente minutes que dure le journal, défilent surtout des « têtes parlantes » en studio, dont les propos sont entrecoupés de deux interviews de militants : celle de Sophie Binet, dirigeante confédérale de la CGT chargée de l’égalité entre les hommes et les femmes, puis celle d’Henri Rossi, président de la Ligue des droits de l’homme en PACA. A Beyrouth, le correspondant nous parle de l’Iran de son balcon…
Si le journal télé du Média a voulu s’échapper de la télévision classique, en revendiquant en particulier son engagement contre les politiques gouvernementales, il n’a pas pour autant inventé de nouveaux formats. Ce « 20 heures » reste peu révolutionnaire dans la forme et s’avère plutôt austère. Néanmoins, il n’a pas manqué de verser dans l’autopromotion avec l’interview en plateau d’un « socio », l’humoriste et scénariste Bruno Gaccio, qui s’était fait connaître avec « Les Guignols de l’info » : « J’attends que vous soyez en éveil et en explication du monde », a-t-il dit, après avoir remarqué : « Vous pourriez être ce qu’est Le Monde diplomatique par rapport à un gratuit. » En tout cas, le tunnel de brèves du début, avec quelques illustrations vidéo et les photos de l’Agence France-Presse (AFP), n’a pas été du goût de tous les spectateurs : « L’impression de voir un bulletin radio filmé », a déploré un socio. Les plus militants, eux, ont été comblés.
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