Le PDG de Facebook Mark Zuckerberg à San Francisco présente la plateforme Messenger le 25 mars 2015

Le PDG de Facebook Mark Zuckerberg a dévoilé de nouveaux services pour sa messagerie instantanée Messenger.

afp.com/Josh Edelson

Mark Zuckerberg aime s'aventurer dans de nouveaux territoires, en ce moment. Réalité virtuelle, vidéo en direct... et intelligence artificielle. Ce mardi, il a dévoilé, lors de la conférence F8 (dédiée aux développeurs), des services de "chatbot" dans sa messagerie instantanée: un assistant virtuel avec lequel il sera possible de dialoguer au sein de Messenger, et des outils permettant aux marques d'utiliser le chatbot de Facebook pour leur propre relation client.

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Le réseau social teste depuis l'été dernier son chatbot, baptisé "M", géré en partie pour l'instant par une trentaine de vraies personnes qui l'"entraînent" et vérifient ses réponses. Le projet est chapeauté par un Français, Alexandre Lebrun.

Facebook Messenger compte 900 millions d'utilisateurs dans le monde. C'est la deuxième application la plus populaire dans le monde, après Facebook. Avec une telle force de frappe, l'arrivée du réseau social dans l'univers des "agents conversationnels" fait frémir la concurrence. Microsoft, qui est déjà très investi dans le domaine (avec hauts et des bas), mais aussi Google, qui travaillerait sur un nouvel assistant virtuel, en plus de Google Now.

Qu'est-ce qu'un chatbot?

Les premiers programmes informatiques conçus pour entretenir une conversation avec un humain datent des années 60. Eliza est l'un des plus connus (il est actuellement en libre-service au musée du Quai Branly, dans le cadre de l'exposition Persona). Autrefois limités à des simulations très automatisées basées sur la reconnaissance de combinaisons de mots-clés et de syntaxe - Le Figaro se remémore par exemple l'existence du petit trombone "Clippy" qui servait de module d'aide dans Office - ils se sont, petit à petit, améliorés et on parle aujourd'hui de véritable "intelligence artificielle".

Egalement appelés "agents conversationnels", leur principale caractéristique est de permettre un dialogue avec la machine en langage naturel.

La version la plus aboutie des chatbots, c'est ce que l'on nomme aujourd'hui les "assistants virtuels": Siri, Google Now et Cortana sur les ordinateurs et les smartphones, ou encore Amazon Echo qui remplit les mêmes fonctions mais prend la forme d'une petite enceinte conçue pour la maison. Ces assistants virtuels sont d'autant plus intelligents qu'ils sont capables d'aller chercher sur internet les informations qu'on leur demande.

A quoi ça sert?

Pourquoi intégrer un robot qui fait la conversation à Facebook Messenger? Par exemple pour commander un taxi, voir la météo, acheter sur un site de e-commerce, prendre un rendez-vous, réserver un resto... Le tout par tchat, en langage naturel, et sans sortir de Facebook. Facebook a précisé que les "bots" vont permettre "de mettre en place à la fois des abonnements automatisés, mais également des messages personnalisés comme des confirmations de commande ou notifications d'envoi d'un colis".

C'est rapide, simple, et efficace (au moins en théorie, nous ne l'avons pas testé). Et pour Facebook, cela permet de rendre l'utilisateur encore plus captif.

Vous pouvez déjà lire la presse et regarder des vidéos sans sortir du réseau social grâce à Instant Articles et aux vidéos en format natif. Bientôt, vous n'aurez plus, non plus, besoin d'aller sur les sites ou les applis de vos marques préférées pour demander conseil à votre banque, souscrire à un nouveau forfait ou vous plaindre que votre commande n'est pas arrivée.

Facebook M

Des captures d'écran du chatbot "M" de Facebook, en bêta test.

© / Facebook

Comment ça marche?

Les bots s'ajoutent dans la liste de contacts Messenger comme on ajouterait des amis. Ainsi il suffit d'ajouter le compte d'une marque pour pouvoir lui envoyer des messages et en recevoir de sa part.

Facebook a indiqué que le chatbot n'aurait pas accès aux données de votre profil Facebook. On comprend mieux l'intérêt, maintenant, d'avoir séparé les deux applications. En revanche, il y a des chances que le chatbot conserve les informations (carte bancaire, numéro de téléphone...) à partir du moment où vous les lui avez données une première fois. L'avantage, pour le consommateur, est qu'il ne transmet que les données qui lui sont vraiment utiles.

Est-ce vraiment plus pratique?

Entre un agent conversationnel comme celui de Facebook et un assistant virtuel comme Siri, il y a quand même quelques différences:

  • Énoncer une requête à haute voix peut faire gagner du temps et s'avérer pratique en mobilité, mais une conversation textuelle est plus confidentielle, et permet par exemple d'envoyer des images, si tant est qu'elles puissent être interprétées par le programme.
  • Siri ou Cortana sont une façon de naviguer dans le téléphone ou le PC et sur Internet. "Siri ne vous permet pas de dialoguer avec une marque qui se branche sur le chatbot, comme le fera Messenger", explique Caroline Pandraud, directrice de l'activité "customer experience" au sein de l'agence Fabernovel.
  • Le chatbot de Facebook est une alternative à la multiplication des applis sur les smartphones. Ce qui a deux avantages: gagner de l'espace de stockage, et "réunifier" l'expérience utilisateur.
  • Par rapports aux textos, Messenger permet de répondre à une notification. Imaginons que la SNCF prévienne un utilisateur d'un retard de train, celui-ci pourrait en retour demander les conditions générales de remboursement.
  • Par rapport à des interactions à l'intérieur des applis, Messenger permet d'intégrer une conversation de groupe. Par exemple: vous cherchez une séance de cinéma pour y aller entre amis. Imaginons qu'Allociné soit compatible avec le chatbot Messenger, tous les membres de la conversation verront les séances proposées par le robot.
Kik

Le "botstore" de la messagerie Kik.

© / Kik

Est-ce complètement nouveau?

En Asie, des messageries instantanées telles que WeChat ou Line sont déjà ouvertes aux marques. En Chine, Microsoft a lancé en 2014 un programme appelé Xiaoice, qui fonctionne comme un ami virtuel. Ce programme a servi de confident à plusieurs dizaines de millions d'utilisateurs en seulement quelques jours, certains lui déclarant même leur flamme.

La messagerie canadienne Kik, quant à elle (275 millions d'utilisateurs), est la première à avoir lancé un "bot store". Sephora y dispense ses tutoriaux de maquillage. Citons encore la messagerie professionnelle Slack, qui a intégré les services de la chaîne de restauration Taco Bell comme le détaille The Verge.

Avec Facebook Messenger, ces initiatives vont changer d'échelle. Ce sera peut-être enfin, pour Facebook, l'occasion de mettre un pied dans le e-commerce, ses tentatives en la matière ayant pour l'instant échoué. "En Asie, les messageries sont utilisées pour à peu près tout. Organiser un voyage, payer ses factures d'électricité... Elles intègrent depuis longtemps des services transactionnels. Pour que Facebook transforme l'essai, il faudra démontrer que sa plateforme est suffisamment sécurisée", conclut Caroline Pandraud. Le prochain chantier.

Bots Facebook Messenger

Les bots s'ajoutent dans sa liste de contacts comme on ajoute des amis.

© / Facebook

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