Géant du rock russe et de la scène underground soviétique, Victor Tsoï est un artiste russo-coréen peu connu en Europe. Mort prématurément dans des circonstances troubles, l’artiste est devenu bien malgré lui une icône de la contestation en URSS et la voix de la jeunesse soviétique.
Biographie
Victor Tsoï (Виктор Цой) naît le 21 juin 1962 à Léningrad. Son père, Robert Maximovitch Tsoï, était un ingénieur coréen (koryosaram) et sa mère, Valentina Vassilievna, une professeure. Intéressé très jeune aux arts, Victor Tsoï fréquente des ateliers d’arts plastiques puis entre en 1977 à l’école des Beaux Arts de Serov où il se forme à la sculpture sur bois avant d’être renvoyé à 18 ans. Il décide de se consacrer à la musique, et notamment au rock. Fan de Deep Purple et de Black Sabbath, Victor Tsoï fonde avec Maxim Pashkov le groupe Ward No. 6.
Une décennie de rock
Le groupe se produit dans des soirées scolaires et des appartements mais en 1981, le gouvernement russe, afin de canaliser la scène underground, décide d’ouvrir un club de rock à Léningrad. Victor Tsoï, qui s’est rapproché de la scène punk et a créé un nouveau groupe, le Garin et Hyperboloids, essaye de tout faire pour pouvoir s’y produire. En janvier 1982, c’est la grande première pour le groupe qui, dès lors, va enchaîner sorties de disques et concerts. La même année, il change de partenaires et fonde le groupe Kino avec qui il restera pendant toute sa carrière. Il est âgé de vingt ans et son groupe cartonne chez les jeunes soviétiques.
C’est à cette époque que Victor Tsoï rencontre son épouse Marianna Rodovanskaïa, artiste et écrivain, qui aide le groupe tant sur le style que sur l’administratif. Ils ont un fils, Alexandre Tsoï, né le 26 août 1985. Un an plus tard sur le tournage d’Assy en hiver, la star montante du rock soviétique rencontre la journaliste Natalya Razlogova dont il s’éprend. Sans rompre son mariage, Victor Tsoï s’installe avec elle.
Histoire d’une légende
En 1987, Victor Tsoï commence à apparaître au cinéma avec le film Assa de Sergueï Soloviov. Si jusque-là sa figure de contestataire romantique était connue des milieux musicaux, il commence une ascension fulgurante en URSS. En 1988, il joue pour Rachid Nougmanov dans Aiguilles qui présente les déboires de la toxicomanie en URSS – sujet tabou à l’époque – et fait quinze millions d’entrées en deux ans.
Sans prendre parti lui-même, Victor Tsoï incarne bientôt une figure insubordonnée qui déplaît au gouvernement à mesure que sa popularité augmente auprès des Russes. Pourtant le chanteur s’est toujours défendu de participer au mouvement de la Perestroïka et défendait des paroles qui appelaient à un changement profond entre les personnes.
La 15 août 1990, âgé de 28 ans, Victor Tsoï décède lors d’un accident de la route en Lettonie où il était parti se reposer après l’enregistrement de son dernier album. De retour d’une partie de pêche où il s’était rendu en solitaire, sa voiture a percuté un bus le laissant sans vie. Sa mort entraîne une vague de suicides chez ses fans et la tristesse empreint l’Union Soviétique. Son style de vie, de musique et la promptitude de son existence tout comme la violence de sa mort en ont fait une légende populaire dont l’importance est encore très prégnante en Russie.
« Tsoï est plus porteur de sens auprès des jeunes que tout politicien, célébrité ou écrivain. C’est parce que Tsoï n’a jamais menti et n’a jamais retourné sa veste. Il était et resta lui-même. Vous ne pouvez pas ne pas le croire… Tsoï est le seul rockeur qui ne présente aucune différence entre son image et sa vie réelle, il vivait de la façon dont il chantait… Tsoï est le dernier héros du rock. »
Extrait d’un article du journal Komsomolskaïa Pravda, le 17 août 1990
Victor Tsoï aujourd’hui
Victor Tsoï a été le sujet de nombreuses adaptations littéraires et cinématographiques. Parmi elles, le récent film Leto (Лето) de Kirill Serebrennikov inspiré de l’autobiographie de Natalia Naumenko. De nombreux monuments en son honneur ont aussi été érigés à Saint-Pétersbourg, Kiev ou encore Moscou dont le célèbre mur Tsoï au 37 rue Arbat. Sur le lieu de l’accident, en Lettonie, un mémorial en l’honneur du chanteur révèle l’ampleur du mythe qu’était ce rockeur soviétique.
Sources : Le Monde diplomatique | France Culture | Soyuz | Colta
Article rédigé par Casado Hélène.