Maisons de disques : un crédit d'impôt contesté
•Un article du collectif budgétaire assouplit les conditions du crédit d'impôt pour la production.•Son coût, modeste, pourrait être plus élevé que prévu.
Par Elsa Conesa
C'est un avantage fiscal méconnu, mais dont le coût augmente d'année en année. Le crédit d'impôt phonographique, qui bénéficie aux entreprises de production musicale, a été élargi dans le projet de budget rectificatif, ce dont s'émeut la rapporteure générale du budget, Valérie Rabault (PS), dans son rapport sur le texte.
Créé en 2006 et étendu à plusieurs reprises depuis, ce crédit d'impôt permet de soutenir la production et le lancement de nouveaux talents francophones dans la musique. Les entreprises de production peuvent, sous certaines conditions, déduire de leur impôt sur les sociétés les frais qu'elles engagent pour lancer de nouveaux albums (frais de personnel, location de studio...).
13 millions d'euros
Le projet de budget rectificatif, examiné cette semaine à l'Assemblée, propose de le prolonger jusqu'en 2018, d'élargir le champ des dépenses éligibles aux rémunérations des dirigeants, d'augmenter le plafond de 800.000 à 1,1 million d'euros, et de réduire le taux du crédit d'impôt, sauf pour les PME. Au total, le coût du crédit d'impôt augmente de 2 millions, pour s'élever à 13 millions d'euros.
Même si le coût de cet avantage fiscal est limité, le rapport souligne que l'efficacité du dispositif reste mal évaluée. « Les chiffres relatifs au coût du dispositif et au nombre d'entreprises concernées varient sensiblement suivant les interlocuteurs ou les sources consultées », écrit la rapporteure générale. Bercy estimait ainsi à 115 le nombre d'entreprises bénéficiaires en 2013, contre 58 pour le ministère de la Culture. La part des grandes entreprises bénéficiaires est en outre non négligeable puisqu'elles captent près d'un tiers de l'enveloppe totale, alors que le crédit d'impôt se veut un dispositif de soutien des labels indépendants...
Efficacité incertaine
Le rapport cite également les travaux menés en 2011 par le Comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, qui a jugé ce dispositif à la fois « très dérogatoire » - il se fonde sur des dépenses déjà déductibles - et peu efficace, puisque, « depuis 2003, le nombre de nouveaux talents "engagés" par les maisons de disques françaises a baissé de 47 % ».
Au final, l'article du collectif pourrait coûter plus cher que les 2 millions prévus, puisque « le seul relèvement du plafond du crédit d'impôt applicable aux trois majors devrait entraîner une augmentation de l'enveloppe de 900.000 euros », dit le rapport. Valérie Rabault a déposé un amendement réservant la prise en compte de la rémunération des dirigeants dans les dépenses éligibles aux entreprises les plus petites.
Elsa Conesa