Selon la fédération française des Safer, ces sociétés chargées de faciliter l'accès au foncier en zone rurale, sur les 240 installations en viticulture qu'elles accompagnent en moyenne chaque année, les deux-tiers sont le fait de nouveaux arrivants, sans aucune attache familiale avec le milieu du vin.

"Il y a 50 ans, à peine 3 % des installations en agriculture se faisaient hors cadre familial, elles sont 30 % aujourd'hui et la viticulture n'y échappe pas", résume Pierre Pouget, directeur des Sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer) pour les régions Aquitaine-Atlantique (ouest et sud-ouest de la France).

C'est une bonne chose, approuve Emmanuel Hyest qui préside la Fédération des Safer: "Si on compte sur les seuls enfants pour assurer la relève, on n'y arrivera pas. Là, on voit arriver des gens qui viennent réaliser un rêve et c'est tant mieux, parce qu'il faut être motivé pour tenir".

LE PRIX DU FONCIER ONÉREUX

On compte 70.000 exploitations, 28 % de moins qu'en 2000. Selon la Mutualité sociale agricole (MSA, organisme de protection sociale pour le secteur agricole), le nombre d'installations en 2011 avait baissé de 20 % par rapport à 2007. Mais c'est pire ailleurs : 35 % des exploitations polyculture/élevage restaient sans repreneur et 30 % pour les productions céréalières.

Reste le prix du foncier, souvent onéreux et surtout, la vigne prend son temps : entre la plantation, la récolte et le temps de la vinification bien souvent la première cuvée se fait attendre 3 à 4 ans. Dès lors, il suffit de peu pour basculer : la MSA constate que cinq ans après l'installation, un quart des vignerons ont jeté l'éponge.

Mais de nouveaux modes de financement permettent de se lancer et de "répondre à la demande de gens qui n'auraient pas pu y arriver seul", relève M. Hyest.

LE SYSTÈME DU PORTAGE

Ce peut être le système du portage : la Safer achète la parcelle et la loue au vigneron les cinq premières années, en lui gardant les loyers comme premier apport auprès des banques. Le système a permis à un jeune de s'installer en Saint-Emilion (sud-ouest) malgré un ticket d'entrée à 200.000 euros l'hectares, note Michel Lachat, responsable des Safer viticoles.

Ou bien un investisseur passionné totalement étranger au monde du vin rejoint un aspirant vigneron : un jeune œnologue a pu dépasser le prix décourageant du foncier en Bourgogne (est) et s'installer sur une parcelle en appellation Marsannay grâce au soutien d'un imprimeur, garanti par la Safer. Douze ans plus tard, la paire s'apprête à sortir son premier millésime.

"La Safer est prête à étudier toutes les demandes", fait savoir Emmanuel Hyest. "Chaque opération est du cousu-mains. Notre priorité c'est le renouvellement de générations, de faire revenir les jeunes".

PROFIL : 35 ANS ET 20 HECTARES

En 2010, 49 % des surfaces exploitées en viticulture appartenaient à des plus de 50 ans. Surtout explique Michel Lachat, "si on est dans des appellations qui souffrent, les fils des viticulteurs qui connaissent les difficultés ne sont pas tentés. Alors que la viticulture garde une image positive et valorisante à l'extérieur".

Et puis les nouveaux arrivants sont souvent porteurs de projets innovants : associer la vigne au tourisme, à des dégustations, des chambres d'hôtes... "Ils apportent du dynamisme au terroir", souligne-t-il sans cacher que ce type de projet enrichi "peut faire la différence auprès des Safer" entre plusieurs candidats.

La Safer joue le rôle de conseil, fait visiter les domaines, aide à la décision. Car pour la moitié des transactions viticoles (1.500 ha vendus par an) il s'agit d'une première installation. Hors cadre familial les candidats sont âgés de 35 ans environ (29 en cas de succession) et achètent en moyenne 9 hectares pour s'installer sur un domaine d'environ 20 hectares.?


(Avec AFP)