L'hôpital public veut assouplir le « carcan » des 35 heures

Social. Une étude réalisée par la Fédération hospitalière de France (FHF) pointe les difficultés engendrées par les 35 heures à l'hôpital. La FHF réclame aujourd'hui plus de souplesse.

L'hôpital public veut assouplir le « carcan » des 35 heures

    Après la révision des 35 heures réclamée par le Medef pour le secteur privé, va-t-on vers une réforme du temps de travail à l'hôpital public ? Selon nos informations, c'est la proposition que va faire ce matin devant les députés Frédéric Valletoux, président de la Fédération hospitalière de France  qui regroupe les 1 100 établissements publics du pays et leurs 90 000 salariés. Frédéric Valletoux va proposer un assouplissement des 35 heures à l'hôpital, arguments en main.

    La FHF a en effet réalisé entre le 20 août et le 11 septembre une enquête auprès de 151 établissements pour tenter de mesurer les conséquences de la réduction de temps de travail, douze ans après leur entrée en vigueur à l'hôpital. Cette enquête sans précédent, que « le Parisien » - « Aujourd'hui en France » a pu consulter, ressemble à un véritable réquisitoire.

    Des situations très hétérogènes. C'est la première surprise de cette étude : loin d'avoir été appliquée uniformément sur le territoire, la réforme a été une grande source d'inégalités, se traduisant, selon les hôpitaux et les accords signés, par une compensation de la réduction du temps de travail (RTT) allant de moins de 10 jours par an à près de 30 jours. « Sous la pression, les établissements ont maintenu les organisations en place au moyen d'une durée journalière de travail proche des 8 heures, d'où un nombre important de RTT accordé. » Autres inégalités révélées : 1 hôpital sur 2 considère le temps de repas comme du temps travaillé ; de même, le temps de formation donne droit à RTT dans 1 établissement sur 4, tandis que les congés maternité génèrent dans tous les cas des RTT.

    Conditions de travail dégradées. Les personnels qui espéraient un meilleur équilibre entre vie privée et vie professionnelle avec les 35 heures ont dû déchanter. En effet, la promesse de 37 000 créations de postes non médicaux pour compenser la réduction du temps de travail n'a jamais été tenue. En définitive, les hôpitaux n'ont été autorisés à en créer que 32 000. Et les 5 000 emplois de médecins promis n'ont pas tous vu le jour faute de moyens et de candidats, note l'étude. Cette compensation insuffisante entraîne fréquemment des changements de planning de dernière minute. Pour faire face à leurs missions, les hôpitaux multiplient aujourd'hui les organisations dérogatoires basées sur 12 heures consécutives de travail, constate l'étude. « In fine, la mise en place de la RTT ne s'est donc pas traduite par une baisse significative de la pénibilité et encore moins de l'absentéisme », résume la FHF.

    Coûteuses 32 h 30 nocturnes. Le temps légal du travail de nuit à l'hôpital a été plafonné en 2004 à 32 h 30 par semaine du fait de sa pénibilité et pour tenir compte de la RTT. Cependant, le surcoût de cette décision a été très élevé pour les hôpitaux note la FHF, qui avance le chiffre de 69 Mâ?¬.

    Explosion de la facture de l'intérim. Pour compenser les absences de personnels et les 24 % de postes de praticiens hospitaliers non pourvus, les hôpitaux ont fait appel à l'intérim. En 2011, cette facture a bondi de 23 % en un an, pour passer à 67 Mâ?¬, auxquels il faut ajouter 700 Mâ?¬ de rémunérations des contractuels.

    La bombe à retardement du CET. Le compte épargne-temps (CET) se voulait une réponse à la difficulté d'organiser les plannings à l'hôpital et aux attentes légitimes des médecins. Contraints de les liquider tous les dix ans, les bénéficiaires ont réclamé en 2012 le paiement de... 5,9 millions de jours stockés sur leurs comptes, ce qui fut fait en partie seulement. Ces CET, souligne la FHF, continuent de grossir comme une vraie bombe à retardement, qu'il faudra désamorcer.