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Sexe Académie - Doit on s'interdire de faire l'amour dans un lit quand on est un couple stable et que l'on a peur de la routine ?

Reposons calmement la question : peut-on avoir peur de la routine et s'interdire des choses ? Un peu contre-intuitif, comme postulat, non ?

Reposons calmement la question : peut-on avoir peur de la routine et s'interdire des choses ? Un peu contre-intuitif, comme postulat, non ? Bien sûr que le contexte induit des comportements, bien sûr que le lit propose son lot de mollesse et de conjugalité. Mais nous sommes formés à tout détourner, de nos jours – il faut en permanence affirmer son individualité, son imagination, il faut en permanence sortir du lot... ça fait parfois partie de notre travail, ça fait souvent partie de nos passions.

Sur un lit on peut faire un missionnaire, utiliser les bords pour des levrettes, on peut s'y attacher, on peut ramper dessous, on peut toujours laisser les volets pour que les voisins profitent de la vue. Alors finalement, de quoi le lit est-il le signe ? De la tendresse ? Pas nécessairement.

Il y a des trônes de fer et des matelas de tous les dangers. Il y a des oreillers de combat. Mais avant tout, il y a nos dispositions psychologiques, nos renoncements, nos automatismes, qui sont bien plus confortables que notre queen-size moelleux.

J'ai l'impression que pour échapper à la routine, il faut en premier lieu deux personnes ayant envie d'échapper à la routine – deux (si une seule personne fait la locomotive, ça devient vite pesant, parole de locomotive).

Il faudrait ensuite, idéalement, une certaine patience. Echapper à la routine ne produit pas forcément des feux d'artifice comme dans un film de Tom Cruise (et vous pourrez éviter ces masques ridicules façon Eyes Wide Shut). Cette idée de sexualité explosive a quelque chose de fascinant. Mais si la routine est une stagnation, on peut penser à d'autres formes de mouvement : lents, reptiliens, des glissades légères, des trajectoires qui évoluent sans faire la toupie. Un détour d'1° a autant d'importance qu'un 180°. Une accélération millimétrique vaut bien un saut par la fenêtre.

Quand j'entends les gens parler de leurs sorties de route, c'est souvent dramatique. Ou une aspiration à quelque chose de dramatique.

Deux mois ou deux ans plus tard, ça finit toujours de la même manière : la déception de ne pas arriver à tenir le rythme – sans blagues. A vouloir que ça claque tous les jours, on s'épuise. Pourquoi ne pas commencer par réduire nos attentes ? Continuer de vouloir éviter les autoroutes, mais les prendre quand même de temps en temps, et ne pas espérer qu'il y aura des montagnes russes à tout bout de champ ? Il ne s'agit pas de s'économiser, seulement d'admirer le paysage – et parfois, à deux à l'heure, on remarque les détails les plus touchants.

Le contexte de notre sexualité tient moins à la géographie du lit qu'à la psychogéographie de nos attentes. Je suggérerai, pour vous poser un petit défi, de justement garder le lit, à tout prix, et d'essayer de réimaginer tout ce qui peut s'y produire – la complexité des jeux de draps, des voiles, de l'étouffement, des marques de couture, les possibilités induites par les oreillers comme supports corporels, évidemment ce qu'on ramène dans le lit, comme jouets, comme scénarios...

A mon avis, on casse aussi bien la routine dans le confort de son foyer qu'en club.

L'un n'empêchant pas l'autre :)