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Notre réputation dépend beaucoup d'Internet, dont l'ubiquité et l'instantanéité démultiplient la capacité de nuisance. Pour ceux qui veulent faire oublier les épisodes peu glorieux de leur vie passée, c'est raté !
Ainsi, au nom de la liberté d'expression, il est impossible de faire disparaître des archives de presse ou des résultats de recherche un article relatant un fait négatif nous concernant, par exemple une condamnation judiciaire. Demander son déréférencement auprès du moteur de recherche est aussi une démarche vouée à l'échec, sauf à démontrer le caractère erroné ou obsolète de l'article.
Doit-on pour autant endurer les nuisances d'un casier judiciaire numérique toute sa vie ? Non, a tranché la Cour de cassation belge le 29 avril 2016.
Priorité de la vie privée sur la liberté d'expression
Un homme, médecin de profession, s'était plaint du maintien en ligne non anonymisé d'un article, publié 22 ans auparavant, évoquant son implication dans un grave accident de la circulation causé sous l'emprise de l'alcool.
Après une longue bataille judiciaire, il a finalement obtenu gain de cause auprès de la plus haute juridiction de Belgique. Les juges ont estimé que son droit à l'oubli était un élément de sa vie privée, protégée par la Convention européenne des sauvegardes des droits de l'homme. Et, pour décider lequel, du droit à l'oubli du plaignant ou de la liberté d'expression du journal, devait l'emporter, la cour a effectué une balance des intérêts.
Elle a constaté que ce médecin n'exerçait aucune fonction publique et que les faits étaient très anciens. Elle en a conclu que « le maintien en ligne de l'article litigieux non anonymisé, de très nombreuses années après les faits qu'il relate, était de nature à lui causer un préjudice disproportionné par rapport aux avantages liés au respect strict de la liberté d'expression [du journal] ».
Certains juristes regrettent le caractère excessif de cette solution. « Une décision ordonnant de pourvoir les archives de balises de non-indexation par les moteurs de recherche aurait posé moins de questions, commente l'avocat Étienne Wery. Cela aurait eu pour effet de forcer celui qui recherche une information à se rendre directement à la source (sur le site du journal). » Et d'éviter d'altérer la version initiale de l'information...
Liberté de la presse
Quelques semaines plus tard, la Cour de cassation française saisie d'une affaire où il était question, là aussi, de supprimer les noms et prénoms de personnes citées dans un journal à la suite d'une sanction judiciaire, a rejeté l'argument du droit à l'oubli au profit de la liberté d'expression. « Le fait d'imposer à un organe de presse, soit de supprimer du site internet dédié à l'archivage de ses articles […] l'information contenue dans l'un de ces articles, le retrait des nom et prénom des personnes visées par la décision privant celui-ci de tout intérêt, soit d'en restreindre l'accès en modifiant le référencement habituel, excède les restrictions qui peuvent être apportées à la liberté de la presse […] », précise l'arrêt du 12 mai 2016. Sauf qu'ici, c'est le droit des données à caractère personnel (plus restrictif que le droit à la vie privée) qui était invoqué devant la cour.
En attendant l'avis de la cour de Strasbourg sur ce sujet majeur du droit à l'oubli de personnes citées dans la presse, qu'en pense le tribunal de l'Internet ?
Doit-on endurer les nuisances d'un casier judiciaire numérique toute sa vie ? Doit-on, au contraire, permettre la modification d'archives de presse, au risque d'ouvrir la boîte de Pandore de la réécriture de l'histoire ? À vous de juger ! Mais après avoir regardé le 48e épisode de la série Au tribunal de l'Internet ! dans lequel nos deux expertes, Myriam Quéméner et Christiane Féral-Schuhl, plaident le « pour » et le « contre » en... trois minutes.
Ya pas photo : le respect de la vie privée doit toujours l'emporter sur la frénésie médiatique.
L version optimiste du débat est de croire qu'il n'y aurait que de cas noir/ blanc.
Dans les médias, il suffit d'une juxtaposition de votre nom avec d'autres fait ou un titre diffamatoire suivi d'un article factuel citant votre nom, 'proprement'pour que l'assimilation se fasse. Il n'y a pas de fumée sans feu...
Dans le domaine économique, c'est la principale vengeance de syndicats pilotant des articles'limite'. Se taire est avouer, réagir est multiplier son empreinte médiatique.
Ça commence toujours de la même manière : des actions dites limitées pour ne pas stigmatiser puis le cercle des restrictions s’élargit pour en arriver à faire des non pas des exclusions, mais des autorisations pour faire.
Éditer ce qui est autorisé au lieu de ce qui est interdit porte un nom : dictature !