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Vodafone détaille les écoutes réalisées sur son réseau dans 29 pays

Un an après l'affaire Snowden, l'opérateur téléphonique britannique a dévoilé l'étendue des écoutes menées sur son réseau, dans les 29 pays où il est présent.

Par  (Londres, correspondance)

Publié le 07 juin 2014 à 10h45, modifié le 07 juin 2014 à 21h51

Temps de Lecture 4 min.

 Vodafone a décidé de lever un coin du voile. Dans un long rapport publié vendredi 6 juin, l'opérateur téléphonique britannique a dévoilé l'étendue des écoutes menées sur son réseau, dans les 29 pays où il est présent. Le groupe, qui est l'un des tout premiers opérateurs mobiles mondiaux en nombre de clients (400 millions), est très présent en Europe, mais aussi en Asie et en Afrique, y compris dans des pays à régime autoritaire. Il n'opère plus aux Etats-Unis depuis qu'il a vendu ses parts dans l'américain Verizon en 2013.

Les détails publiés sont incomplets, notamment pour des raisons légales, mais jettent une lumière crue sur les dizaines de milliers d'interceptions que les gouvernements du monde entier lui ordonnent.

Vodafone fait aussi un aveu : dans un petit nombre de pays, les autorités ont un accès direct à son réseau, sans même devoir lui envoyer la moindre requête légale ou le moindre mandat.

L'opérateur britannique, très présent à l'international, a décidé cette opération transparence en réaction au scandale provoqué par Edward Snowden. Il y a exactement un an, le 6 juin 2013, le Guardian publiait le tout premier article basé sur les informations de l'ancien agent de la NSA (National Security Agency). Depuis, le débat sur la surveillance sur Internet fait rage.

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« REFUSER D'APPLIQUER LA LOI D'UN PAYS N'EST PAS UNE OPTION POSSIBLE »

Un an plus tard, les multinationales des nouvelles technologies, qui récusent les accusations d'être au service de l'espionnage, ont lancé une contre-attaque. Elles rejettent désormais la responsabilité sur les gouvernements. Microsoft, Apple, Facebook ou encore Yahoo! et LinkedIn ont déjà publié le nombre de requêtes qu'ils reçoivent chaque semestre du gouvernement américain.

Jusqu'à présent, les opérateurs de téléphonie mobile ont été plus timorés. Seules quelques entreprises nationales ont tenté l'expérience : Verizon et AT & T aux Etats-Unis, Deutsche Telekom en Allemagne, et Telstra en Australie.

Le rapport de Vodafone représente donc un tournant. Il détaille sur vingt pages, pays par pays, l'étendue des interceptions. Même l'association Transparency International salue la démarche. « Le rapport est remarquable par sa profondeur », estime Gus Hosein, son directeur.

Si l'opérateur britannique se lance dans cet exercice, c'est pour rappeler qu'il ne fait qu'obéir à la loi. « Refuser d'appliquer la loi d'un pays n'est pas une option possible. Si nous n'acceptons pas une demande légale d'aide, les gouvernements peuvent nous enlever notre licence d'opérateur. »

Il souligne aussi que les demandes d'interception se font souvent dans des situations de crise – par exemple des soulèvements civils ou des élections explosives. « Cela signifie que nos collègues – chez Vodafone – qui collaborent avec les autorités peuvent être en danger s'ils rejettent une demande », note le rapport.

Pour chaque pays, l'opérateur britannique a tenté de fournir deux chiffres pour la période d'avril 2013 à mars 2014. D'abord, le nombre de demandes d'interception de « contenus » qu'il a reçu, par exemple des demandes d'écoutes téléphoniques ou de lecture d'e-mails. Ensuite, le nombre de requêtes de « métadonnées », par exemple pour un téléphone portable, quels numéros ont été appelés à partir de quel endroit et à quelle heure… Mais Vodafone s'est rapidement heurté à de très nombreux obstacles.

Le premier est légal. Chaque pays, y compris à l'intérieur de l'Union européenne, a un cadre juridique très différent pour les écoutes. Beaucoup interdisent la publication de toute statistique sur le sujet. Pour onze d'entre eux, dont trois dans l'Union européenne, Vodafone ne peut donc fournir aucun détail sur l'interception de contenus. Il s'agit de l'Afrique du Sud, l'Albanie, l'Egypte, la Hongrie, l'Inde, l'Irlande, Kenya, du Mozambique, du Qatar, de la Roumanie et de la Turquie.

MALTE EST L'UN DES PAYS LES PLUS SURVEILLÉ

Le deuxième obstacle est technique. Comment comptabiliser le nombre d'écoutes ? Vodafone souligne que les comparaisons d'un pays à l'autre sont très délicates. Par exemple, dans un pays, un même mandat judiciaire peut suffire à ordonner la surveillance de plusieurs personnes sur plusieurs appareils (téléphone, ordinateur, tablette…). Mais dans un autre, effectuer la même surveillance peut nécessiter des dizaines de mandats.

Le rapport de Vodafone laisse quand même paraître des vérités intéressantes. Il montre que Malte est l'un des pays les plus surveillés : malgré une population de 420 000 habitants, l'île a envoyé 3 773 demandes de « métadonnées » à l'opérateur.

L'Espagne a requis 48 600 métadonnées, un niveau qui semble faible par rapport à l'Italie, qui a demandé 605 000 métadonnées. En Afrique, la Tanzanie a envoyé 99 000 requêtes de métadonnées à Vodafone. Sur la France, Vodafone n'a reçu que trois demandes de métadonnées, mais l'opérateur s'est pratiquement retiré du pays depuis la vente de sa participation dans SFR en 2011.

Aussi incomplètes et difficiles à comparer soient-elles, ces statistiques donnent une idée de l'ampleur de la surveillance. Mais ce n'est rien en comparaison du petit groupe de pays – non nommé par Vodafone, mais qui ne dépasse pas six – qui peuvent se servir directement des informations de Vodafone.

« Dans ces pays, les autorités ont un accès permanent aux communications des clients via leur propre lien direct », reconnaît l'opérateur. De quoi permettre une « surveillance de masse sans contrôle », s'alarme M. Hosein.

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