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30 000 € en moyenne de condamnation aux prud'hommes : prévenir l'addition trop salée

Le risque de contentieux aux prud’hommes reste une donnée objective pour les entreprises, avec plus de 24 000 euros à payer en moyenne, selon une étude du ministère de la Justice. Les grandes sociétés ont des juristes et des assurances, qui font souvent défaut aux TPE et PME. Conseils d’experts pour éviter le naufrage financier.

30 000 € en moyenne de condamnation aux prud'hommes : prévenir l'addition trop salée

Christine Rostand, présidente de chambre honoraire de la cour d’appel de Paris, missionnée par le Premier ministre, a remis son rapport sur le suivi de la réforme prud’homale rapport sur le suivi de la réforme prud’homale le 3 mai 2017 à Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux, ministre de la Justice. L’objectif de cette réforme, prise en application de la loi du 6 août 2015 dite loi Macron,  était d’inciter les parties à régler leurs litiges en amont, sans passer par un long processus judiciaire. Sa mise en œuvre devait permettre de revoir la procédure pour favoriser la conciliation, d’avoir des barèmes indicatifs  afin de faciliter la prise de décision et la conciliation. « Si les effets n’en sont pas encore mesurables sur les délais de traitement, ils sont sensibles sur les méthodes de travail », note prudemment le rapport. En revanche, aucune trace sur les sommes allouées. Il faut remonter à janvier 2016 pour trouver une étude du ministère de la Justice sur les indemnités prud’homales accordées aux salariés dans le cadre de la préparation des lois Macron et El Khomri à partir des 401 arrêts rendus par les cours d’appel en octobre 2014 : les indemnités prud’homales (10 mois de salaire en moyenne) sont en moyenne de 24 000 €, le coût juridictionnel global moyen de la rupture et l’indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est de 40 000 € (50 % des cas sont supérieurs à 23 000 €, 25 % supérieurs à 40 955 €). Même s’ils datent de plus de deux ans avec un bilan d’étape de la réforme prud’homale incomplet, ces chiffres fournissent un ordre de grandeur : « un montant moyen des condamnations de l’ordre de 30 000 € », indique pour sa part la société Corporate Assistance. Pour une entreprise avec un chiffre d’affaires important, le risque peut être envisagé. Pour les TPE et petites PME, il peut être dramatique. Alain Vergonnet, président fondateur de Corporate Assistance, a été juge au tribunal de Commerce, où il a pu constater « que les conséquences financières de condamnations prud’homales sont l’une des causes du dépôt de bilan des entreprises ».

Une hotline ainsi qu’une prise en charge des dommages et intérêts en cas de contentieux

Se fondant sur l’expérience anglo-saxonne qui assume depuis longtemps le risque de contentieux, Alain Vergonnet a lancé Corporate Assistance qui s’est spécialisée dans le traitement du risque prud’homal. Son postulat est imparable : « aujourd’hui, il y a 700 000 ruptures annuelles en France, 400 000 ruptures conventionnelles et sur les 300 000 licenciements qui restent, 220 000 deviennent des contentieux. Chaque jour ouvrable, les 210 conseils de prud’hommes délivrent 1 000 jugements pour lesquels 65 % des entreprises sont condamnées. Ce n’est pas neutre ! Peu d’entreprises imaginent ce risque et l’intègrent dans leur réflexion au même titre que le vol ou l’incendie, alors qu’il est plus important ». Corporate Assistance propose un pack qui « représente moins de 100 euros par mois, soit 5 à 6 euros par mois et par salarié dans une entreprise qui peut aller jusqu’à 15 salariés », pour se prémunir contre le contentieux. Mais avant de passer par la case prud’hommes, Alain Vergonnet  plaide pour la prévention qui se traduit par une hotline destinée aux entreprises : « pour respecter les obligations, nous leur mettons à disposition des conseils, une écoute. Par exemple, il ne faut surtout pas que l’affectif conditionne la décision de licenciement. L’aspect juridique est essentiel ». Ou se dire que le salarié va s’épuiser en attendant les délais de jugement ou de recours : il faut provisionner le risque et nul ne sait si une entreprise fragilisée par un contentieux aura les moyens, deux, trois ans ou cinq ans plus tard, de payer une note qui peut être augmentée entre les prud’hommes et l’appel. De plus, les établissements financiers  possèdent aussi cette information car la provision vient en déduction des résultats.  Un seul mot d’ordre : éduquer. Aussi, une autre hotline existe pour les managers en détresse. « Avec ces outils, l’obligation de sécurité devenue une obligation de résultat est respectée ». Enfin, le pack comprend une prise en charge des condamnations aux dommages et intérêts en cas de contentieux.

Anticiper le risque de réputation

Lorsque les entreprises ont franchi l’étape du licenciement, sans conseil avisé d’un expert, les avocats spécialisés doivent défendre leurs intérêts devant les conseils de prud’hommes. Maîtres Anne-Laurence Faroux et Nicolas Billon, associés du département droit social du cabinet Simon Associés y sont confrontés tous les jours. « Le sens de l’histoire va vers un risque de plus en plus encadré », note Nicolas Billon. En effet, en fonction du nombre de salariés (plus ou moins 10 salariés) et de l’ancienneté (plus ou moins  deux ans), le dossier peut être estimé. Dans le cas d’une condamnation, l’entreprise aura rarement à payer plus de 18 mois de salaires. Une somme qui peut être absorbée si l’entreprise a un important chiffre d’affaires, mais « qui peut être très importante pour les TPE », insiste maître Faroux. « La nullité du licenciement peut également coûter très cher », indique-t-elle. « Beaucoup d’entreprises nous consultent pour le risque judiciaire et financier. Elles oublient le risque de réputation, l’image qui restera du contentieux », note encore Nicolas Billon. Le bureau de jugement est public, les autres salariés, mais aussi les clients peuvent être témoins du litige. Les conseils en amont de la mise en œuvre d’un licenciement auprès de spécialistes devraient donc être systématiquement demandés par les dirigeants pour faire baisser les prochaines statistiques du ministère de la Justice.

Claire Padych

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