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Femmes

CAC40 : qui sont les champions de l'égalité hommes-femmes?

Au moment où le ministère du Travail sort son Index pour l'égalité hommes-femmes, Challenges reprend les notes obtenues par les grands groupes du CAC40.

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La ministre du Travail, Muriel Pénicaud à l'Assemblée nationale le 6 février 2019.

La ministre du Travail, Muriel Pénicaud à l'Assemblée nationale le 6 février 2019.

AFP/Archives - Christophe ARCHAMBAULT

Muriel Pénicaud, la ministre du Travail, présente ce mardi 5 mars le premier index sur l'égalité salariale hommes-femmes. "Nous voulons instaurer dans notre pays une compétition positive entre les entreprises", ce qui devrait jouer sur "l'attractivité des talents, la réputation, l'amélioration du dialogue social", a-t-elle précisé, loin du name & shame que le gouvernement avait défendu par le passé. Le décret Pénicaud du 9 janvier, qui met en place cet index, est cependant une mesure forte qui inscrit la France en pays précurseur. Il instaure une obligation de résultat: l’égalité salariale doit être atteinte d’ici à 2022 sous peine de sanctions financières pouvant aller jusqu’à 1% de la masse salariale. Les entreprises qui obtiendront une note en dessous de 75 points sur 100 auront trois ans pour mettre en place des mesures correctives. Seules les entreprises de plus de 1.000 salariés sont concernées depuis le 1er mars 2019, les autres ont six mois ou un an de délai.

L’index de l’égalité professionnelle et salariale se mesure grâce à une note sur 100 qui compile cinq critères pondérés en fonction de leur importance. L’écart de salaires femmes-hommes, primes comprises, compte pour 40 points; la proportion de femmes bénéficiant d’une augmentation pèse 20 points; les promotions accordées aux femmes valent 15 points; l’obligation d’augmenter les salariées en retour de congé maternité au niveau des augmentations générales vaut 15 points; enfin, le nombre de femmes parmi les plus hautes rémunérations d’un groupe compte pour 10 points.

* Dans la journée du 5 mars, le groupe Atos a mis à jour sa note avec les dernières données en sa possession sur les retours de congés maternité : elle passe ainsi de 71 à 86.

Les plus gros écarts dans la construction, l'assurance et la finance

Pour cette première étape, seules 700 sociétés ont rempli leurs obligations à date sur les 1.400 concernées. Parmi les répondantes, 118 obtiennent moins de 75 points, la note la plus basse est fixée à 51. D’après une étude d’impact du ministère, les secteurs de la construction, des activités financières et de l’assurance sont ceux où les écarts de rémunération sont les plus importants en France. Certaines entreprises n’atteignent pas la note requise: Safran Aerosystems (69) et ArcelorMittal Industeel (73) dans le CAC40, GRDF (73), Radio France (73) et Bolloré Logistics (69) parmi les grands groupes. Certains résultats sont contre-intuitifs: Engie présidé par la féministe Isabelle Kocher passe la barre mais stagne à 79 points, Eramet, dirigée par une femme, n’obtient que 69 points. Certains groupes présentent des résultats très différents entre leurs diverses entités, ce qui révèle des différences de management fortes. C'est le cas d'une filiale de Thales et d'une de Safran, d'après la ministre qui se réjouit que ces entreprises aient "une prise de conscience" et puissent agir en conséquence.

Avant même la conférence de presse de la ministre, Challenges a rassemblé les index de la quasi totalité des groupes du CAC40 sur le tableau ci-dessus. Nous avons même imaginé d'intégrer cet indicateur dans notre classement annuel des patrons les plus performants, publié en décembre dernier. Ajouter un critère de parité à ceux de croissance, de rentabilité et de parcours boursier nous semble montrer combien la mise en œuvre d’une politique d’égalité des genres est un facteur de performance. En version bêta, en mixant cette note aux résultats de l’an dernier, cela ne modifierait pas le gagnant (Legrand), mais cela chamboulerait les places d’honneur: BNP Paribas, Renault, LVMH et Crédit Agricole suivraient derrière, pour ce classement amendé, bien dans l’air du temps.

Dès le 1er mars, les entreprises qui ont obtenu les meilleurs scores sur l’index se sont dépêchées de les publier sur leurs sites. Ainsi, Michelin et Orange affichent un fier un 94/100. L’une des entités de Sodexo, Hygiène et propreté, atteint même 100/100. Ces entreprises sont déjà connues pour leur culture de l’égalité. Pour les autres, il a fallu calculer cet index en quatrième vitesse à partir de la base de données économiques et sociales (BDES) et des logiciels de paye habituels, exclure les apprentis et intérimaires des effectifs, retrancher les heures supplémentaires mais prendre en compte les primes. Et surtout présenter les résultats sous leur meilleur jour. "Il est possible de s’arranger avec les critères choisis, de compenser l’écart de salaires par d’autres, regrette Sophie Binet, en charge de l’égalité à la CGT. Les mauvais élèves ne sont, en fait, pas de bons maquilleurs."

De bons résultats trompeurs

"L’avantage de cet index est qu’il ne se limite pas aux écarts de salaires mais tient compte des promotions et des retours de congé maternité", précise Rachel Silvera, économiste et auteure d’Un quart en moins. "Je regrette un manque de transparence car on ne connaît pas l’écart de salaire réel." D’autant que le décret a mis en place un seuil de pertinence de 5%, soit un abattement qui permet aux entreprises de gommer une part de l’écart de salaire dans le calcul de l’index. Une disposition critiquée par plusieurs syndicats.

Le calcul de l’index est si complexe que certaines entreprises s’en tirent bien, malgré des inégalités de salaires. C’est le cas de Capgemini notée 94 sur 100. "Pourtant, nous estimons que les écarts de salaires s’élèvent entre 5 et 10% dans l’ensemble du groupe", explique le secrétaire général du syndicat CGT. "Et les femmes qui reviennent de congé maternité après le mois de mai sont augmentées au mois de janvier suivant... Capgemini devrait avoir zéro sur ce critère là." Le groupe dément pourtant ce chiffre et avance un écart salarial de seulement 2%, d'après les calculs de l'expert-comptable mandaté par le comité d'entreprise. Avant de préciser que "les augmentations de salaires des femmes rentrant de congés maternité sont strictement appliquées en conformité avec la loi".

Même genre d’arrangements chez HSBC qui avance un 87/100. Pourtant, la banque avait été épinglée pour des écarts de salaire de 59% en Grande-Bretagne dans une étude de Reuters de mars 2018. En France, elle ne comptait encore aucune femme parmi les dix plus hautes rémunérations en 2017.

Ces résultats peuvent être affinés avec l’aide des syndicats. "C'est un instrument de mesure opposable", a précisé Pénicaud. Ils doivent être communiqués au Comité social et économique (CSE, qui remplace l'ancien comité d'entreprise). Mais l’index ne suffira pas à corriger ces inégalités: les entreprises doivent continuer à négocier des accords égalité professionnelle avec des mesures concrètes comme des enveloppes de rattrapage salarial pour augmenter les femmes discriminées ou des revues de personnel qui favorisent leurs promotions. Pour veiller à ce que l’effort soit constant, l’Inspection du travail a été mandatée afin d’effectuer 7.000 contrôles par an sur le sujet.

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