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Les prix des médicaments dans le radar américain

¤ En raison de la fragmentation du système, les prix sont difficiles à contrôler. ¤ Mais la réglementation pourrait évoluer et les laboratoires doivent s'adapter.

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Par Catherine Ducruet

Publié le 7 sept. 2016 à 01:01

« Après le beau temps, la pluie pour les laboratoires pharmaceutiques aux Etats-Unis ? » Tel est le titre d'une étude que publie la Coface, alors que la question du prix des médicaments, particulièrement élevé outre-Atlantique, s'est invitée dans la campagne électorale.

Dernière intervention en date sur le sujet : Hillary Clinton a annoncé vendredi son intention de créer une agence publique pour sanctionner a posteriori, par des amendes, les augmentations de prix « injustifiées et aberrantes » des médicaments vitaux pour les patients. Multiplication par 7 du prix de l'EpiPen contre les chocs allergiques, par 50 de celui de Daraprim contre la toxoplasmose, par 5 de l'Isuprel, utilisé dans les urgences cardiaques... Les exemples foisonnent. Et le procureur de l'Etat de New York a annoncé mardi l'ouverture d'une enquête contre le laboratoire Mylan au sujet des contrats de ventes de l'EpiPen à des organismes gérant les écoles.

Cependant, les projets d'Hillary Clinton sont très loin de l'agence fédérale, sorte d'avatar de notre Sécurité sociale, chargée de négocier un prix unique avec les laboratoires, telle que la prônait Bernie Sanders, son concurrent malheureux aux primaires. Outre cette agence, le programme d'Hillary Clinton veut « favoriser la souscription d'assurances santé via Medicare », explique l'étude de la Coface, ce qui « permettrait au ministère de la Santé de négocier les prix des médicaments sur ordonnance ».

Bonne volonté de façade

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Mais l'ampleur de la réforme « dépendra avant tout, si elle est élue, de sa marge de manoeuvre, explique, Khalid Ait-Yahia, économiste à Coface, c'est-à-dire de la majorité ou non que les démocrates obtiendront aux deux chambres ». Et du rapport de force avec le lobby de l'industrie pharmaceutique, connu pour sa puissance. « Le débat sur la santé est de toutes les campagnes électorales américaines », rappelle, pour sa part, Hervé Ronin, « partner » santé chez Bryan Garnier. « Mais, ce qui est mis en oeuvre une fois les élections passées est toujours très en dessous des ambitions affichées pendant la campagne. » Un contrôle des prix est de toute façon difficile à mettre en place aux Etats-Unis, « en raison de la fragmentation du paysage des payeurs et de leur faible poids relatif », selon Khalid Ait-Yahia.

Donc pas de quoi s'inquiéter, à court terme, outre mesure pour les laboratoires, même si la tendance de fond est malgré tout à un meilleur contrôle des dépenses de santé dans un pays où ils réalisent leurs plus fortes marges. Cela n'empêche pas certains comme Novartis d'afficher une bonne volonté, au moins de façade. Dans une interview, en juillet, au « Financial Times », son président, Joe Jimenez, expliquait qu'il fallait imaginer « de nouvelles façons de fixer les prix », telles que le paiement à la performance. Il a proposé cette méthode aux assureurs qui rechignaient à rembourser l'Entresto. Ce nouveau médicament contre l'insuffisance cardiaque devrait permettre de diminuer les hospitalisations, et avoir un effet bénéfique sur les coûts globaux de santé, justifiant ainsi un prix supérieur à celui des traitements standards. Sanofi et Amgen seraient aussi embarqués dans une telle approche pour leurs nouveaux produits contre le cholestérol, censés réduire la mortalité cardiovasculaire.

En cas de sérieuse pression à la baisse sur les prix, certains agitent la menace d'une baisse des dépenses de R&D, et donc de l'innovation. « De nombreuses études économétriques soulignent l'existence d'un lien de causalité entre les prix des médicaments sur le marché et le nombre de molécules dans le pipeline », rappelle l'étude de la Coface. Une analyse qu'on ne partage pas chez Bryan Garnier. « La R&D ne représente qu'une partie des dépenses des laboratoires, objecte Hervé Ronin, et ils n'ont fait qu'amorcer, ces dernières années, l'amélioration de leurs structures de coûts. En outre, leurs marges plus que confortables leur permettraient d'absorber sans problème des baisses de prix de 20 %. »

Cela pourrait, en revanche, influer sur la décision de privilégier un domaine thérapeutique plutôt qu'un autre. Certains laboratoires sont d'ailleurs déjà sur cette voie, comme AstraZeneca, qui concentre ses efforts sur la cancérologie au détriment du diabète, où la pression sur les prix est forte.

Catherine Ducruet

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