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Forum de Rennes

Quel contrat social pour Facebook?

Événementsdossier
par Alexandre Pikiakos, entrepreneur et créateur de youmood.me
publié le 16 mars 2013 à 17h25

L’organisation entre eux des internautes comme acteurs du web constitue le cœur du web 2.0, qu’on appelle aussi, et ce n’est pas anodin : le web social. Le socle de cette révolution : Facebook. En créant le concept même de «réseau social», le géant du web a créé un nouvel univers social, tout-numérique. Et si, dans cette adhésion collective à la sphère Facebook, on retrouvait l’idée du «contrat social» ?

Confiance et méfiance dans la société Facebook : pourquoi se méfie-t-on de l'utilisation des données personnelles ? Aujourd'hui, impossible de pouvoir assister à une fête sans avoir Facebook : plus personne ne prend la peine de vous appeler, vous devrez avoir consulté vos «événements». L'usage des réseaux sociaux est devenu si répandu qu'il est nécessaire, voire excluant, pour avoir une vie sociale normale. En échange, les internautes doivent divulguer des informations en lien avec leur vie privée.

Or, à chaque fois qu’on a souhaité enregistrer à grande échelle des informations d’ordre «privé», les citoyens ont témoigné de la méfiance. En France, la tentative du ministre Giscard d’Estaing de mettre en place un large système d’information sur les citoyens (Safari, l’ancêtre du fichier Edvige) a même généré la création de la CNIL, aujourd’hui fleuron en droit international de la protection de la vie privée.

Sur le minitel ou sur les forums de discussion du web 1.0, il était habituel pour les internautes de s’attribuer un pseudo afin de protéger leur identité. Le partage des données personnelles n’est donc pas instinctif. Il est pourtant devenu spontané car aujourd’hui, 75% des internautes acceptent que la divulgation de données personnelles soit monnaie courante (étude de la Commission Européenne, 2011).

«Pacte social facebookien» et web 3.0 : risques et opportunités d'un internet totalement libre. Dans les théories du contrat social, la renonciation à la liberté ne se fait pas de manière unilatérale : le pouvoir est en permanence menacé par une révolution populaire s'il n'agit pas dans l'intérêt général. De même, Facebook ne peut pas rompre si facilement la confiance que les internautes lui accordent, puisqu'elle est au cœur de sa survie ; c'est pourquoi tous les grands réseaux sociaux se sont petit à petit astreints à une plus grande transparence dans leur exploitation des données personnelles.

Cette protection ne serait toujours pas satisfaisante au regard de la législation européenne, et suscite le débat. Le cœur du problème est que les libertés fondamentales, et donc la protection de la vie privée, sont protégées par l’Etat (le vrai, pas le numérique), et ses tentatives législatives encore rares (loi de 1978, loi de 2004). Facebook et les réseaux sociaux, eux, sont des entreprises : leur finalité n’est pas l’intérêt général, c’est l’argent. Facebook pourra-t-il devenir notre Etat sur Internet ?

Contrat social idéal du web 3.0 : un internaute éduqué et doté d'outils de contre-pouvoir. La révolution du web ne s'arrêtera pas là. En quelques années, le web 2.0 a déjà révolutionné nos usages numériques et «IRL» (In Real Life, «dans la vraie vie»). Bientôt, le web 3.0 prendra le relais : un web fondé sur les données. Est-ce une mauvaise nouvelle pour les libertés fondamentales ?

Le contrat social facebookien n’est pas forcément si liberticide : on divulgue ses données personnelles en échange d’une vie sociale, mais on les divulgue dans un océan de données accessibles à tous. L’internet libre est en puissance un outil sans précédent d’éducation du «citoyen du web» ; or un citoyen éduqué est un citoyen plus libre.

On pourra faire confiance au web 3.0 si celui-ci fournit aux internautes des outils pour se fédérer et lutter contre le pouvoir qui dévie de l’«intérêt général du web».

Inscrivez-vous au forum de Rennes «La confiance règne», les 29 et 30 mars. Entrée gratuite sur réservation.

Pour aller plus loin :

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