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L'écran déchaîne les tweets

DOSSIER Le soir, un tweet sur deux concerne les programmes TV. Une nouvelle habitude des téléspectateurs qui intéresse les chaînes pour mesurer, en temps réel, le succès d'un programme et mieux cibler leur public.

Par  et Joël Morio

Publié le 17 mars 2013 à 15h32, modifié le 08 juillet 2013 à 16h48

Temps de Lecture 5 min.

Le soir, un tweet sur deux concerne les programmes diffusés à la télévision. Une nouvelle habitude des téléspectateurs qui intéresse les chaînes pour mesurer, en temps réel, le succès d'un programme et mieux cibler leur public.

Présentés il y a peu encore comme des concurrents mortels de la télévision, les ordinateurs, smartphones et autres tablettes se révèlent de précieux compagnons pour le bon vieux poste. "On estime que les trois quarts des gens qui possèdent un de ces gadgets l'utilisent devant la télévision", observe Sébastien Lefebvre, le président de Mesagraph, une société spécialisée dans l'analyse des réseaux sociaux pour la télévision.

Ces téléspectateurs connectés n'ont pas toujours une activité sur le second écran correspondant avec ce qui se passe sur le premier, mais elle est de plus en plus liée. Il y a ceux qui vont pianoter sur leur objet numérique préféré pour vérifier une information ; d'autres qui consultent la biographie d'un acteur ; tandis qu'un nombre croissant de téléspectateurs donnent leur avis sur ce qu'ils regardent.

Facebook et surtout Twitter permettent de réagir instantanément à l'étrange lucarne. Sur Twitter, la télévision représente près de la moitié des sujets de conversation, le soir, pendant le prime time. "Depuis son origine, la télévision a toujours été un sujet de conversation autour de la machine à café, le lendemain matin. Aujourd'hui, on peut capter ces discussions", observe Olivier Goulet, président d'Iligo, une société d'études et de conseil spécialisée dans les comportements liés aux nouvelles technologies. Selon la dernière édition du baromètre qu'établit le cabinet sur les usages des "nouveaux écrans", plus d'un quart des Français commentent régulièrement les programmes sur les réseaux sociaux et, chez les 18-34 ans, la proportion grimpe à 40 %.

 JEUNES, HYPERCONNECTÉS, MOQUEURS

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Iligo a ainsi dressé la typologie de ces "twittos", fans du petit écran. Il les a classés en fonction de leur regard plus ou moins distancié sur les émissions et leur implication émotionnelle. Un grand groupe est composé d'individus qui réagissent souvent au premier degré à ce qu'ils voient. Prompts à critiquer ou à s'enthousiasmer, ils commentent les performances de leur équipe de sport préférée ou des candidats des télé-crochets.

Très nombreux aussi, jeunes et hyperconnectés, les "moqueurs" gardent un certain recul sur ce qui se passe et sont toujours à la recherche d'un bon mot. Les "tatillons" vont, pour leur part, traquer la moindre erreur dans les déclarations des hommes politiques et spécialistes, ou lors d'émissions d'information. Enfin, les "intellos" n'hésitent pas à donner leurs avis sur les grands sujets de société, car ils estiment que leur point de vue est indispensable au débat.

"Twitter n'a pas le monopole des conversations sur la télévision, cependant il offre le temps réel et se montre complètement ouvert. La dynamique, la spontanéité et l'intégration dans les appareils de ce réseau rendent son utilisation particulièrement simple et adaptée pour réagir en direct aux programmes", analyse Sébastien Lefebvre. Le sport, les débats et les émissions de télé-réalité cartonnent sur la Toile. Les télé-crochets, à l'instar de "The Voice", excitent Twitter, et les tribulations des "Anges de la télé-réalité" sur NRJ 12 ou des "Ch'tis" sur W9 déclenchent les passions.

Le réseau social en ligne Twitter a relevé la fourchette de prix envisagée pour l'entrée en Bourse de ses actions.

Comme Médiamétrie pour les audiences de la télévision, Mesagraph envoie chaque matin vers 9 heures un tableau de bord de l'activité sur Twitter générée par les programmes.

Ces informations sont une mine d'or pour les chaînes "qui sont entrées en quelque sorte en contact direct avec les téléspectateurs", juge Wale Gbadamosi Oyekanmi, fondateur de Darewin, une agence spécialisée dans la "social TV", nouveau terme pour résumer les relations entre télé et réseaux sociaux. Les diffuseurs peuvent ainsi faire une étude plus fine du comportement des téléspectateurs.

 PLUS DE TÉLÉCOMMANDE

"Quand le groupe One Direction a été invité à "Danse avec les stars", on a observé un pic d'audience. Cependant, en analysant les tweets, on s'est aperçu que c'étaient des jeunes qui n'avaient pas l'habitude de voir le programme qui étaient venus le regarder. Et ce nouveau public est ensuite resté sur l'émission", raconte Sébastien Lefebvre. Pour lui, l'analyse de tout ce qui circule sur Twitter permet de prendre des décisions sur les programmes et... de discuter des tarifs des publicités avec les annonceurs, car le nombre de tweets témoigne de l'attachement du public.

"En s'emparant du deuxième écran, le téléspectateur laisse tomber la télécommande, il ne zappe plus", résume Gérald-Brice Viret, directeur délégué du pôle télévision du groupe NRJ.

Pour les petites chaînes, la présence sur les réseaux sociaux s'avère stratégique : "Il n'est pas facile de faire émerger un programme quand il existe plus de vingt-cinq chaînes. Les réseaux sociaux sont un canal de communication puissant pour le faire connaître, même s'il n'y a pas de corrélation directe entre le nombre de tweets et les audiences", fait remarquer Wale Gbadamosi Oyekanmi, dont la société a contribué à la renaissance du "Bachelor" sur NT1.

Les diffuseurs incitent donc de plus en plus les téléspectateurs à commenter leurs émissions. D'ici à penser que les futurs programmes seront construits de manière à provoquer les tweets, il n'y a qu'un pas. On s'en défend chez NRJ 12 : "Nous n'avons rien changé à notre ligne éditoriale. Si le programme est fort il va générer de facto des réactions sur les réseaux sociaux", rétorque Gérald-Brice Viret. Pour le moment, les grandes chaînes ont développé des applications à installer sur tablette ou smartphone pour réagir, mais aussi avoir accès à des bonus : coulisses, interviews exclusives, etc.

"TOUTES LES ÉMISSIONS NE MÉRITENT PAS UN DISPOSITIF NUMÉRIQUE"

TF1 est très en pointe sur le sujet. Depuis février, elle propose une nouvelle mouture de MyTF1 pour interagir avec "The Voice". "D'ici à l'été, l'application va connaître des évolutions dans le domaine du sport, dès le match de football France-Espagne le 26 mars. Les équipes d'e-TF1 travaillent aussi avec la rédaction des journaux télévisés pour enrichir le contenu en matière d'information pour avril, et, bien entendu, un dispositif spécial sera mis en place lors de la diffusion de "Secret Story"", indique Olivier Abecassis, directeur général d'e-TF1.

Chez France Télévisions, on met en place des applications pour des programmes comme "C à Vous" ou les matchs de rugby du Tournoi des six nations. "Il y a des cas de figure où il faut coller au plus près avec le programme, justifie Antonio Grigolini, responsable de la social TV dans le groupe. Toutes les émissions ne méritent toutefois pas un dispositif numérique. Dans une fiction, on est complètement immergé dans la narration. Cela nous rend moins aptes à interagir avec un second écran. Mais on peut avoir envie de le faire avant ou après l'avoir vue. Ce qui nous intéresse, c'est d'engager le spectateur, car il est plus en plus difficile de capter son attention."

Une concentration qui aura des répercussions économiques : il sera plus facile de vendre un spot publicitaire. A TF1, on réfléchit déjà à des plans médias où les annonceurs pourraient être présents à la télévision, dans l'application de la chaîne, mais aussi sur les réseaux sociaux : "Nous ne sommes pas en compétition avec ces derniers, il faut faire en sorte que un plus un égale trois", s'enthousiasme Olivier Abecassis.

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