La semaine dernière, l'action Facebook a gagné près de 10%, passant de 29,06 à 31,76 dollars en quatre séances. La raison de cette embellie significative, qui permet au réseau social d'espérer retrouver bientôt son cours d'introduction initial (38 dollars)? La convocation des journalistes à une conférence de presse, mardi 15 janvier à 10h (19h en France), au siège de l'entreprise. "Venez voir ce que nous en sommes en train de construire", promet le carton d'invitation.
Le plus probable est que Facebook présente de nouveaux services destinés à monétiser son audience, notamment sur mobile, comme il l'a déjà fait ces dernières semaines (sur les spams, les SMS ou pour les entreprises). Mais la façon mystérieuse dont il a invité les journalistes, digne d'Apple, a déclenché la curiosité. Les marchés anticipent désormais une annonce importante, et les médias américains s'interrogent sur ce que le PDG, Mark Zuckerberg, prépare.
Tour d'horizon des différentes rumeurs, avec les commentaires de Virginie Lazès, directrice associée de la banque d'affaires Bryan Garnier & Co.
1. Un smartphone
La rumeur court depuis longtemps. A l'heure où Apple, Google, Amazon et Microsoft tentent d'"emprisonner" les utilisateurs à l'intérieur d'un système exclusif comprenant les supports, les systèmes d'exploitation et les catalogues d'applications et de produits (iPhone-iPad vs Android vs Kindle Fire vs Windows 8), Facebook peine à trouver un modèle économique qui tienne la route. Le lancement de son propre smartphone permettrait au réseau social de venir se frotter aux trois gros, pour livrer bataille dans ce qui devient la plus grande guerre industrielle de notre époque.
Ce mouvement serait le plus audacieux. Mais, même si le mobile est le nouveau Byzance du monde de la high-tech, il est très incertain: Facebook est-il capable de créer un système d'exploitation rivalisant avec Android et iOS? Mark Zuckerberg a reconnu lui-même l'été dernier que la construction ex nihilo d'un "Facebook phone" n'avait "pas beaucoup de sens". Toutefois, on peut comprendre de cette déclaration qu'une alliance avec un fabricant existant est envisageable. Si des rumeurs (un peu folles) ont évoqué l'hypothèse BlackBerry, rappelons que Microsoft est actionnaire de Facebook.
Virginie Lazès: "Le grand défi de Facebook est de monétiser son audience mobile. Pour cela, il a intérêt à être le plus agile possible dans ses développements logiciels. Aujourd'hui, il n'y a pas assez de place sur un écran de téléphone pour afficher les flux d'information et la publicité. Or c'est vital pour le réseau social. Pour autant, je ne vois pas Facebook devenir un vendeur de smartphones, il a besoin d'un partenaire pour fabriquer."
2. Un moteur de recherche
Là aussi, ce serait un très gros coup. Fort de son immense communauté (1 milliard d'utilisateurs actifs), Facebook pourrait lancer un moteur de recherche capable de fouiller dans les données qu'il brasse en continu. Une telle stratégie ne déplairait sans doute pas aux annonceurs, et encore moins aux investisseurs. En revanche, elle devrait irriter Google, dont Mark Zuckerberg piétinerait ouvertement les plates-bandes.
Le jour même où le jeune milliardaire écartait l'idée d'un "Facebook phone", il révélait avoir mis en place une équipe pour travailler sur le "search". Le moteur de recherche imaginé serait fondé sur la recommandation sociale. Entre toutes les rumeurs actuelles, c'est l'hypothèse qui tient la corde. D'autant que la presse anglaise croyait savoir il y a quelques semaines qu'une (puissante) alliance entre Facebook et Yahoo, qui a réussi dans ce domaine avec son service "Answers."
Virginie Lazès: "L'idée serait de créer un moteur de recherche 'embeddé' sur les flux de Facebook, sur son historique. Il y a beaucoup d'informations à retirer des discussions qui ont existé entre les différents utilisateurs. Cela revient à poser des questions à l'ensemble de la communauté."
3. Un service musical
Ce n'est pas la première fois qu'on en parle non plus. Quoi de mieux, pour retenir les utilisateurs le plus longtemps sur votre site, que de lancer votre propre service de musique en ligne (payant sans publicité, gratuit avec)? Ce sont pour l'instant des applications extérieures, comme Spotify ou Deezer, qui offrent cette possibilité sur Facebook.
Le réseau social en a sans doute assez de laisser filer un chiffre d'affaires précieux, là où Apple s'appuie sur sa cash-machine iTunes. Microsoft l'a compris, qui s'est déjà lancé récemment dans l'aventure avec Xbox Music. La concurrence est vive sur le marché. Mais avec son ADN social, grâce auquel les "amis" peuvent partager leurs goûts pour Psy, Lady Gaga ou Jake Bugg, Facebook dispose d'un atout non négligeable.
Virginie Lazès: "Les études montrent qu'il y a beaucoup de flux sur Facebook qui ont trait à la musique. En plus, on peut écouter des chansons tout en restant connecté sur le réseau social."
4. Une boutique en ligne
La prospérité (relative) d'Amazon fait des jaloux. Et pourquoi pas moi?, doit penser Mark Zuckerberg, qui, après tout, possède le plus gros fichier clients du monde. D'ailleurs, le réseau social qui connaît tout de vous a déjà avancé ses pions sur ce marché. Après avoir racheté la start-up spécialisée Karma, il a lancé au mois de septembre une application, baptisée "Gifts" (cadeaux), qui permet aux utilisateurs d'acheter à leurs amis, dont c'est l'anniversaire, des présents (peluches, chocolats, gâteaux, etc.). Veut-il désormais aller plus loin et devenir le principal fournisseur de DVD, de livres, de billets de spectacles, de légumes, bref un immense supermarché?
Virginie Lazès: "Je ne vois pas l'intérêt. Avec du commerce en ligne, Facebook ferait une marge de 5% alors qu'il fait 50% actuellement. C'est un métier radicalement différent, qui demande des stocks et une logistique énorme."