La quête de sens des community managers, ou l’effet moutons de Panurge

Les billets sur l’avenir du community manager fleurissent un peu partout sur les blogs en ce moment. Ce serait à lui de se réinventer, de faire sa place dans les entreprises pour que le poste trouve son utilité. Beaucoup parlent d’une bulle, d’une remise en question profonde du métier, d’une nécessité de multiplier les tâches. C’est exact, mais attention à ne pas tomber dans les mêmes travers qui ont fait du mal à la profession ces derniers mois… En premier lieu, la quête de sens perpétuelle qui amène les community managers à justifier en permanence leur présence dans l’entreprise.

Une quête de sens

ROI, engagement, nombre de retweets, likes… Les community managers ont inventé leurs propres metrics, aidés par des réseaux sociaux bien heureux d’ajouter des « achievements » à leurs utilisateurs et d’alimenter le mythe de la présence indispensable des entreprises sur leurs sites. D’expérimentations, certaines pratiques sont devenues courantes voire obligatoires, avec en premier lieu la fameuse page Facebook et son edgerank. Parce que le community management, souvent, est avant tout une affaire de tendance. Pinterest pointe le bout de son nez ? Tout le monde y va de sa page innovante et tente d’argumenter pour y trouver une utilité. Nous ne sommes plus dans l’empirisme, nécessaire depuis toujours en ligne pour expérimenter et trouver de nouvelles voies, mais dans le discursif, avec une justification permanente des actions entreprises par un discours théorique.

Et si le problème était là, justement ? Le discours et la théorie ont la part belle. Ou plutôt les discours faussement théoriques, qui reposent sur des aprioris non fondés, sur des on-dit, sur du ressenti. On parle de stratégie, mais on en oublie la pratique. Il n’y a jamais eu autant de consultants, de « stratégistes », d’agitateurs d’idées et autres vendeurs de poudre de perlimpinpin. Deux ans d’expérience ? Je mets plus les mains dedans, l’exé c’est pour les autres, me voilà créateur de concepts et révolutionnaire des RS. Le problème, c’est que la théorie, tout le monde en est capable. C’est l’application des belles paroles qui pose généralement problème. Surtout quand on sait que plus de 80% des community managers qui vont faire le boulot derrière ont moins de deux ans d’expérience.

Résultat ? On vend du rêve aux entreprises et aux annonceurs, sans avoir les moyens de l’assumer derrière (ou très rarement). Beaucoup se retranchent alors derrière les fameux metrics mis en place, voire derrière des discours sensés apporter du sens. Vous comprenez, nous n’avons pas eu de résultat, mais nous sommes dans un processus de construction qui portera ses fruits à moyen terme. Nous construisons votre communauté petit à petit. Mieux vaut du qualitatif que du quantitatif. Mais si vous n’avez aucun des deux ? Vous tenterez toujours de vous justifier par des études obscures ou des discours théoriques bien rodés pour légitimer votre place et l’importance du CM. Quitte à y dépenser tellement d’énergie qu’il n’en restera plus beaucoup pour trouver de nouvelles voies de développement.

Éviter le cercle vicieux et ne pas croire les opportunistes

Le problème dans ce genre de cas, c’est le cercle vicieux qui est engendré. Le métier se construit sur le tas, avec ses codes, ses valeurs, ses théories de référence… Les community managers parlant beaucoup entre eux, certaines « bonnes pratiques » se répandent comme des légendes urbaines. C’est le cas aussi des justifications de poste et des « règles » à respecter, même si elles ne s’appliquent pas du tout à votre entreprise ou à votre mission. Quand un aveugle guide un aveugle… Les nouveaux venus partent donc souvent sur de mauvaises bases, véhiculées par des un peu moins nouveaux, qui les ont lu sur le blog « expert » d’anciens nouveaux cherchant à s’imposer après avoir lu des conseils sur le personal branding.

Plutôt que d’expérimenter, beaucoup se contentent d’utiliser les recettes réchauffées trouvées ici et là, ne prenant pas le temps de vérifier leur intérêt. Et le community management ayant été le buzzword des années 2010 et 2011, la récupération est grande. Entre les semi-escrocs qui en profitent pour vendre des formations vidéos inutiles sur le sujet et ceux qui déclarent avoir 200 000 contacts en ligne, on assiste à une génération d’experts incapables de vendre autre chose que des idées non abouties. Mais qui sont écoutés par certains nouveaux entrants, entreprises comme community managers. Et on se tire une balle dans le pied…

Le pire dans tout ça ? Les écoles suivent le même chemin. On ne sait pas trop si c’est une stratégie marketing ou une méconnaissance de ce qu’ils sont sensés enseigner, mais quand on voit certaines accroches… Sup de web, école supérieure des métiers du web, affirme ainsi dans son dernier CP : « Parce que passer sa journée sur Facebook ou Twitter peut être un métier« . Mais bien sûr. EMweb, l’école des métiers du web, entendait il y a peu dans sa présentation aider ses étudiants à « booster le buzz ». Tout un programme. Mais alors, à qui se fier au milieu des discours vides de sens ?

Creuser de nouvelles pistes

Le chemin pour donner du sens à notre métier risque d’être long et compliqué. On risque probablement d’avoir plusieurs écoles qui s’affrontent, basés sur des postulats différents. Les postes étant déjà radicalement différents, si en plus les finalités et méthodes passent du tout au tout, on pourra difficilement parler d’unité et de cohérence. Mais plutôt que d’abdiquer, autant se donner les moyens de ses ambitions et tenter de faire son travail du mieux possible en explorant des pistes qui peuvent fonctionner. On peut très bien présenter des chiffres qui justifient nos actions et des démarches intelligentes sans avoir besoin de faire un raccourci foireux pour pouvoir mettre une photo de chat sur la page Facebook de son entreprise pour améliorer son taux d’engagement. On peut également comprendre que le community management n’est pas utile à tous, mais ça c’est encore autre chose, et déclarer qu’une bonne partie des postes dans leur forme actuelle ne servent à rien ou presque serait criminel, je ne m’y risquerais pas.

Le mieux est encore de s’intéresser à ce qui parait intéressant et bien amené. Des projets communautaires comme Evian The source, qui va au bout de la logique de création de contenu et de curation, par exemple. Ou d’autres comme Backstage de BNP-Paribas, qui arrive à prouver que la marque employeur n’est pas qu’une théorie floue, un marronnier prenant la suite de la e-réputation et de ses dizaines d’experts en bois. Il existe bien sûr des stratégies qui fonctionnent, des initiatives rafraichissantes, des innovations d’usages qui font envie. Le tout est de les étudier, mais aussi de tenter différemment plutôt que de suivre des préceptes aux origines floues. Plutôt qu’une quête de sens, privilégions une recherche des bonnes pratiques de demain !

Et pour aller plus loin, commencer par dresser le constat de la situation en France ne peut être qu’une bonne chose. Si ce n’est pas encore fait, n’hésitez pas à lire notre enquête sur les community managers en France en 2012.

 

Les community managers en France 2012

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20 commentaires
Commentaires (20)
  • Camille A

    Bon article (c’est bien quand tu t’énerves un peu :-)).

    Je plussoie (comme on dit), et effectivement au-delà des CM on retrouve cette tendance à s’asseoir sur les « bonnes recettes’ dans de nombreuses pratiques du web (j’en causais l’autre jour à l’erepday).

    Juste une remarque : « par un discours théorique »… Et là, je dis non : justement il n’y a aucune théorie derrière la plupart des discours! Qu’on me démontre que même 5% des gens qui parlent « d’influenceurs » aient un jour lu Lazarsfeld qui à développé (entre autre) la notion de leader d’opinion…
    Je pense que justement, il y a peu de réflexion « théorique » et encore moins, comme tu le souligne, un passage de la pratique à la méthodo et inversement. Il me semble qu’on est dans une « théorie de l’expertise », où l’on prend quelques cas, on les dits « représentatifs » et hop-là : si Coca fait ça, alors c’est bon, on a des métriques, on a des « best practices », etc.

    De mon point de vue (mais ça se discute) tant que l’on se focalisera sur les outils et la technique, et pas sur la méthodo qui va derrière et surtout pour une entreprise des objectifs concrets de business (comme tu le dis, la stratégie c’est bien, atteindre des objectifs c’est mieux), alors on aura des CM sous-payés, des presses-boutons qui achètent des fans, etc.

    Bref, reste modérateur (la médiation a même des « vraies théories »), le CM c’est un peu surfait en fait 😀

  • Flavien Chantrel

    Par un discours faussement théorique si tu préfères 😉 Mais beaucoup se gargarisent actuellement d’être au-dessus de la mêlée, d’être passé à autre chose et de ne vouloir s’occuper que de la stratégie de fond. Parfois sans savoir comment cela fonctionne précisément. Théorie de l’expertise comme tu dis… Qui est beaucoup plus simple à développer qu’une connaissance issue de la pratique.

    Et vive les modos ^^

  • Benoît Faverial

    Hello Flavien,

    Ton billet me surprend, et puisque tu cites à la fois le mien et un bout de ma bio twitter, je vais me permettre de répondre.

    Tu parles des dérives du métier de ces derniers mois, mais le métier dérive depuis que Facebook est devenu grand public, et depuis que l’on a substitué le rôle de lien entre une entreprise et le web à celui de cheerleader pour le Community Manager.

    Le métier dérive depuis que le terme de « buzz » est entré au top 10 des expressions utilisées par les CM, et depuis que l’on a oublié que le job était à l’origine celui de « la voix » d’une boite sur les réseaux, dépouillée de perspectives marketing, vente, ou part de voix.

    Tu cites justement des projets qui s’éloignent de ces standards dont je ne fais que dire qu’ils sont voués à mourir, puisque justement cette conception du métier uniquement basée sur le bruit et la masse d’audience est une impasse. Et de ce fait tu prêches contre ton propos, puisque sans un peu de théorie fumeuse et d’objectifs clairs au départ, on n’aurait pas pu inventer ex nihilo un projet de marque employeur participatif ou de curation par la communauté.

    Comment faire pour qu’une entreprise qui a lu un papier sur le formidable buzz du web ouvre les yeux et arrête d’engloutir des fortunes en pub pour faire venir une audience sur une page Facebook et lui faire gagner des iPads ?
    Comment faire pour qu’ils ne soient pas dégoutés d’investissements à perte et qu’ils décident que finalement les réseaux sociaux ne sont qu’un canal sur lequel investir n’a aucun intérêt ?

    Soit on copie gentiment et sans réfléchir les Etats Unis en étant béats d’admiration devant tant de génie (Backstage est une copie quasi conforme de la première version du réseau Live Solid par exemple), soit on se secoue un peu les neurones et on essaie de montrer la réflexion qui a mené à ces résultats.

    Là où je suis ennuyé, c’est que je suis d’accord avec une majorité du reste de ton papier, les écoles qui vendent des faiseurs de buzz et les gens qui promettent des audiences dantesques ne sont que les chevaux de troie de la bulle des réseaux sociaux. Celle là même qui ne survivra pas à la crise actuelle en fait.

    Tout le problème est d’essayer d’éviter que la définition du métier de CM ne soit emportée par cette vague.

  • Sylvain Guéguen

    Merci pour cet article qui aura certainement le mérite de créer de l’échange. Je ne suis pas certain que ce que tu dises soit réservé au métier de CM…

    Je vois très régulièrement des sociétés à qui des prestas peu scrupuleux ont vendu du référencement ou un site web ou effectivement du CM et au final tu es obligé de repartir à zéro pour avoir une base seine.

    Dans nos métiers, il n’y a pas de barrières à l’entrée : diplôme, certfications, etc. vraiment reconnues. Du coup, sur le marché tu croises des opportunistes qui sans expériences appliques des tarifs de dingues et font clairement de la merde et par ailleurs des artisans au sens nobles du terme qui essaient de faire de la qualité.

    Effectivement en ce moment on le voit particulièrement sur les compétences liées au communautaire car en plus de la mode, du manque de certification, il y a un effet de mode : Je veux mon CM en agence et chez l’annonceur.

    Partant sur ces bases on ne peut pas faire de la qualité.

    Quand tu parles de sens, la quête est plutôt au niveau de la stratégie / tactique. Qui fait le boulot et quel est son poste, on s’en moque l’important c’est qu’il soit fait et bien fait (aligné sur les objectifs de l’organisation et sur les besoins des utilisateurs).

    Trop souvent c’est juste de la comm 1.0 voir 0.1 déguisée

  • Rémi Gambier

    Bonjour à tous,

    En tant que CM très axé sur l’opérationnel (oh oui je sais c’est un peu surfait^^), je comprends tout à fait ce que tu as voulu transmettre dans cet article Flavien.

    Dans la mesure où ce boulot s’appuie sur des plateformes en constante mutation, avec des enjeux qui diffèrent entre chaque projet et des internautes qui, de plus en plus, apprennent eux aussi à apprivoiser le Web, autant dire que les recettes toutes faites de certains « prophètes » prêtent à sourire (exemple : « les dix bonnes pratiques pour engager vos fans », ce genre de titre ça sent rarement très bon).
    Je ne pense pas qu’il faille forcément opposer le consultant et celui qui est dans l’opérationnel (j’en veux pour preuve que Benoît et toi êtes d’accord au final).

    Il est nécessaire de repenser les stratégies et les pratiques appliquées au Web social, et ce, constamment. Nous serions des charlatans si nous disions qu’il existe des voies toutes tracées pour réussir. Le problème est que les entreprises sont souvent obnubilées par la nécessite d’obtenir des résultats à court terme, et certaines plateformes comme Facebook (où toutes les marques et organisations veulent être) ne permettent plus vraiment de créer des communautés. L’internaute devient un simple client, c’est dommage parce qu’il a beaucoup plus à apporter.

    Tout ça pour dire qu’il est certes important de prendre en compte l’avis de celui qui met les mains dans le cambouis, car être en première ligne ça permet aussi de prendre le pouls d’un projet, mais l’avis de celui qui prend un peu plus de hauteur a autant de valeur, car il est difficile d’être vraiment objectif quand on a la tête dans le seau (et je sais de quoi je parle^^).

    Bon ok… Je prône un peu la voie du milieu de façon éhontée 🙂

  • Matthieu

    Très bon article effectivement !

    Le community management ce n’est pas de la magie, il n’y a pas de recette miracle qui a marché pour une entreprise et qui peu marcher pour toute.

    Il faut un temps énorme pour s’approprier les codes d’une entreprise et de ses clients, savoir à qui on parle et comment lui parler. Il faut analyser, faire un état des lieux, au lieu de vouloir absolument placer une stratégie qui ne sera pas adaptée à cette entreprise en particulier avec laquelle on travaille.

    Un community manager doit toujours accompagner son client (l’entreprise ou organisation à laquelle on vend ses services) et lui apprendre, lui expliquer pourquoi il serait intéressant de faire ceci plutôt que cela. On ne doit pas se retrouver avec un client qui ne comprend RIEN à ce que l’on bricole.

    Il faut expérimenter et quasiment à chaque fois repartir de zéro. Il faut tester, faire des erreurs et rectifier le tir. C’est seulement à ce prix qu’on saura s’adapter à ce qu’attendent les clients-consommateurs. Car, oui, on s’adresse bien souvent avant tout à des clients; la « communauté » est bien souvent un mythe.

    Et malheureusement combien d’entreprises vont se faire arnaquer……….?
    Dommage pour l’e-réputation du métier.

  • Flavien Chantrel

    @Benoit : en gros, on est d’accord sur à peu près tout, sauf avec les deux exemples que j’ai cité.

    Le métier dérive avec la notion de buzz et on a perdu le lien entre entreprise et public => complètement d’accord, c’est d’ailleurs de là que découle la perte de sens. A force de vouloir coller du CM partout, faut bien justifier le poste quand il n’y a pas de public intéressé, donc pas de lien à faire sans en créer artificiellement…

    Les projets que je cite s’éloignent des standards => pour moi ils découlent de manière naturelle des marques qui les ont lancé. Le côté marque employeur de backstage est poussé au bout de la logique, avec une vraie offre de service. Que ce soit In fine un succès ou non (visiblement c’est plutôt oui du côté des retours), cela engage l’intérêt même du concept… Pareil pour Evian, le concept est poussé au bout de l’innovation, ils expérimentent et s’en donnent les moyens. Pas de logique de suiveur (même si bien sûr il y a eu des initiatives sans doute dans le même esprit aux US), mais de défricheur. Ils ne cherchent pas le buzz mais plutôt à donner du sens, à offrir de la valeur ajoutée. N’est-ce pas le but pour mieux délimiter les possibilités offertes au Community management ?

    Pour le reste, j’ai l’impression que tu penses que mon papier cherche à démontrer que la théorie est le mal absolu. Pas du tout, il faut bien sûr partir de bases théoriques et de concepts pour bâtir une stratégie qui a du sens. Ce que je reproche, c’est plutôt la tendance de beaucoup à se projeter uniquement dans la théorie fumeuse (comme le dit Camille), théorie découlant de leurs lectures en ligne et absolument pas de retours d’expériences. Bref, je crois que là dessus aussi on est d’accord.

    Globalement j’ai plutôt l’impression que tu reformules ce que j’ai dit dans mon billet (hormis Backstage), peut-être me suis-je mal exprimé 😉 Pour ce qui est de l’extrait de ta bio (que je viens d’aller voir du coup), ce n’était pas intentionnel, j’ai utilisé cette expression comme j’aurais pu en utiliser des dizaines d’autres, pour l’esprit qui s’en dégage. Je ne cherche pas à descendre tout ceux qui essaient de théoriser les médias sociaux, font du consulting ou cherche à prendre du recul. J’explique juste que selon moi, la plupart d’entre eux n’ont ni légitimité ni compétences pour le faire. Mais parfois l’habit fait le moine, surtout en ligne, surtout quand les clients n’y connaissent absolument rien… Mais heureusement, y’en a des biens comme dirait l’autre.

  • Benoît Faverial

    Merci pour les précisions, je me suis probablement emporté avant de vraiment réfléchir (comme souvent >_<)

    On est bien d'accord !

  • Flavien

    Bien sûr qu’est possible de créer une communauté sur Facebook. On peut créer une communauté n’importe où. Ca demande juste du temps et de l’engagement. Il ne faut pas laisser les fans végéter entre eux.

  • Thierry de Baillon

    « le rôle de lien entre une entreprise et le web »

    C’est peut-être là d’où vient le problème au fond, parce qu’un lien, c’est soit vu comme un élément tactique, dans la « vieille » économie, soit avec des tickets et des coupons de réduction pleins les yeux, par les communicants et marketeux (tactique encore, en fait).

    Alors que si de « lien » il s’agit (et j’y agrée volontiers Benoît), c’est l’expression Community Manager elle-même qui se vide de sens, et il serait temps de se poser la question de ce dont les entreprises ont VRAIMENT besoin. Oublions un peu les communautés et parlons un peu plus humblement d’entités, parce que les communautés autour des marques existent-elles vraiment ? Bof bof… en tous cas généralement pas sur les pages FB, et en interne, elles sont encore plus difficiles à définir, si ce n’est à faire prospérer. Par contre, tout ça, ce sont des entités, distinctes, foisonnantes, qui créent du sens, du contenu, des idées…

    Et faire le lien entre des groupes, c’est l’une des tâches irréductibles d’un manager, community ou pas. Par contre, la nouveauté, c’est de non seulement créer et faire grandir un lien, mais de capter l’information qui se crée et s’échange au sein de ces entités, d’en déceler du sens et créer du savoir, pour le transmettre soit aux entités concernées soit ailleurs.

    Encore de la théorie ? Peut-être, à vous de juger… Mais surtout un autre angle de vue qui permettrait de sortir du junior-CM, de la tactique publicitaire à sens unique, de l’importance démesurée portée aux réactions sur le web et de justifications plus ou moins opportunistes.

    Ce n’est pas le métier qui dérive, mais à la fois la volonté de beaucoup de trouver la ligne la plus courte entre l’action et les espèces sonnantes et trébuchantes, et le refus par bien des entreprises de comprendre que le rôle d’un manager doit profondément changer. Le CM ? Un métier transitoire, qui fait le lien entre l’ancien et le nouveau monde…

  • Seb

    Flavien,

    Au risque de répéter Benoît avec qui je suis d’accord, il me semble que tu opposes « stratégistes » comme tu dis et « pratiquants » de l’autre. C’est une vision erronée des choses. D’une part, il faudra me prouver que les stratégistes sont bien présents en entreprises. Ils sont rares et les bons le sont encore plus. D’autre part, une stratégie ne vaut que si elle est pratiquée et une pratique ne sera bonne que si elle a été bien pensée en amont. Il n’y a donc rien à opposer ici.
    Pour le reste, je suis d’accord avec toi : les formations et tout le bataclan…

    Le supposé et faux ADN même du community management, à savoir la rapidité, l’instantanéité que l’on vend à tout prix ici et là fait basculer les entreprises dans le tout et le n’importe quoi, à savoir la profusion d’outils dont on ne sait à quoi ils servent. Facebook pourra être très utile à une entreprise quand il faudra l’éviter pour une autre. Idem pour les autres outils.
    A titre d’exemple, je discutais il y a peu avec un community manager qui n’avait qu’un seul but : être présent partout et ouvrir des profils ici et là. Je veux bien mais pourquoi ? C’est le grand problème de la communication qui aurait du devenir, dans notre pays, une fonction stratégique justement et qui n’est devenue qu’une fonction support. Car à force d’outils et de métrics sans intérêts, on a oublié à quoi servait ce métier (de communicant) et on est tombé dans ce que tu décris : des investissements auxquels on ne croit plus.
    Il ne faut pas réinventer le métier, il est très utile et il est suffisamment dynamique. Il faut simplement savoir l’expliquer à un dirigeant ou un manager. Et ça si ça paraît a priori facile, c’est très difficile au contraire. La peur de la technique sans doute et du « je n’y comprends rien ». Seule la stratégie à savoir le bon sens, la définition d’objectifs clairs et chiffrés, l’utilisation des bons outils et des métrics bien pensés permettront d’arriver à ce résultat…

  • Antoine Dupin

    Très bon Flavien. Tu sais ce que j’en pense donc je ne ferai pas de longues diatribes qui me feraient passer pour un troll, je voulais juste commenter un soutien ! Good Job

  • Pierre-Etienne

    Tu reviens sur certains effets que je classifie dans la catégorie « boule de cristal ». Entre chiffres contradictoires, analyses haut-perchées, luttes intestines de bon aloi… le web-marketing n’en finit pas d’influencer les community managers.

    Si je comprends bien, tu postes ces personnes dans des entreprises. Leur rôle essentiel, de base, serait de canaliser et d’agrémenter les flux d’informations relatives à la marque qui les emploie.

    La dérive se situe-t’elle chez les électrons libres du blog pépère ? Chez les chercheurs mathématiciens du web ? Chez les rebouteux du réseau social ? Chez les colporteurs du Saint-Graal médiamétrique?

    Ou chez ses propres CM qui se cherchent une sémantique et une sémiologie afin d’étayer une philosophie non écrite ? Nous naviguons en eaux troubles – non pas opaques mais bouillonnantes – et chaque jour promet son nouvel outil de mesure révolutionnaire.

    S’inventer un langage compris de la caste ne fera pas clarifier la chose. Et la frilosité de nos entrepreneurs nationaux ne fera que se renforcer.

  • François Houste

    J’ai une tendance naturelle à adhérer aux coups de gueule, et pour le coup je ne peux que suivre les yeux fermés celui-ci. Particulièrement sur un point, que certains qualifieront de « Théorie de l’expertise » (j’adore ce terme, pensez à la déposer).

    Ce qui est vrai pour les Community Manager est vrai dans la totalité des métiers du Marketing Web. On ne peut concevoir de campagne, de promotion, de mise en avant d’un client, sans avoir un minimum les mains dans le camboui. Le comportement « 2 ans d’expérience, le Community Management c’est pour les autres » est pour moi irresponsable, et l’est tout autant d’un responsable Search, Affiliation ou e-CRM. N’importe quel responsable web a besoin de se heurter au parpaing de la réalité pour valider ses idées ou s’enrichir de nouvelles expériences. Considérer qu’on est « trop senior » pour faire de la mise en pratique soi-même, c’est quelque part ne pas avoir compris l’essence même du web. En ce sens, j’en veux énormément aux écoles de segmenter les fonctions de cette façon et de souvent zapper la « culture générale » du Web.

  • Flav

    Bien d’accord avec toi Sylvain : l’important c’est la stratégie bien sûr, le tout étant que la personne en charge de la stratégie connaisse un minimum le terrain et les répercussions de ses actions. Eviter les opportunistes comme tu le soulignes, totalement déconnectés mais qui sentent le bon filon. Je ne dis pas que la stratégie est moins importante que le terrain, juste qu’il est plus facile de se faire passer pour un stratégiste en matière de médias sociaux (c’est à la portée de n’importe qui)) que d’appliquer les bonnes recettes sur le terrain. Et ces deux parties de l’équation doivent être bien faites si on veut arriver à un résultat optimum.

  • Flav

    Bien sûr que celui qui prend un peu de hauteur a un avis aussi important 🙂 Voire même plus. Tant qu’il sait ce qu’il fait ! Pour les communautés, elles existent, le problème est qu’on essaie de les vendre à toutes les sauces, même à des entreprises qui ne seront pas capables d’en fédérer. Créer une communauté n’est pas la seule finalité du community management, heureusement. Après tout dépend de ce qu’on met derrière le mot communauté…

  • Flav

    « On ne doit pas se retrouver avec un client qui ne comprend RIEN à ce que l’on bricole. » Je suis bien d’accord avec toi. Mais certains trouvent ça tellement plus confortable…

  • Flav

    Sur le terme community manager, on est d’accord qu’il n’est pas adapté. Et pour le lien, bien sûr. Le problème c’est que cela se passe rarement de manière aussi fluide qui décrite dans votre commentaire. Le but est de tendre vers cela, mais il reste du chemin…

  • jyv

    Excusez-moi, je viens troller un petit peu.

    1) Déjà tltr.

    2) Les illustrations sont cools.

    3) Des noms.

    Merci

  • Mito BANJAC

    J’adhère completement à cette analyse.

    J’ajouterai a la quête de sens, une petite quête d’utilité (je sais c’est barbare) pour determiner la vrai valeur de tout ca.

    Intégrer les reseaux sociaux dans la strategie globale de l’entreprise suppose reellement qu’au moins la direction generale comprennent ce que ca va concretement apporter au business. Aujourd’hui c’est une nebuleuse acceptée parce que populaire. Tout le monde est convaincu du pouvoir sans concretement en maitriser les tenants et aboutissants. Bref, la deconvenue sera effectivement un peu dure pour ceux qui ont tout misé sur cette tactique de com sans prendre en compte les objectifs réels de l’entreprise.

    Au plaisir de vous lire.

    Dimitri

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